Atelier ABCDAIRE : la culture comme levier d’éducation à Sidi Kacem

Dans une ville où les opportunités culturelles et éducatives restent limitées, le projet ABCDAIRE est en train de redéfinir l’accès à l’apprentissage et à l’expression pour les jeunes générations. Porté par l’Association Cultures et Migrations , Sidi Kacem, ce programme financé par l’Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH) en collaboration avec plusieurs institutions locales, offre aux enfants et aux jeunes des espaces où ils peuvent découvrir, créer et rêver. Pour Yasmine Bouchfar, présidente de l’association et initiatrice du projet, cette aventure est avant tout un engagement personnel et collectif : « Ayant grandi à Sidi Kacem, je comprends profondément le manque d’activités éducatives et culturelles qui peuvent enrichir l’enfance et offrir des opportunités d’épanouissement. Cette expérience personnelle a été une motivation clé pour lancer cette initiative : créer ce que je n’ai pas eu la chance de vivre étant enfant. »

Le projet ABCDAIRE ne se contente pas d’apporter des activités culturelles aux jeunes de la région , il cherche à transformer leur rapport à l’apprentissage à travers des ateliers hebdomadaires et mensuels en dessin, expression corporelle, chorale et contes, ainsi que des événements culturels ponctuels. Depuis son lancement, plus de 4 000 enfants, jeunes et femmes ont pu bénéficier de ces sessions, témoignant d’un besoin criant d’initiatives éducatives alternatives.

« La culture dépasse les barrières sociales, linguistiques et économiques. Elle permet d’éveiller la curiosité, de renforcer l’identité personnelle et collective, et de transmettre des valeurs humaines telles que la tolérance, le respect et la solidarité », explique Yasmine Bouchfar. « À travers ABCDAIRE, nous souhaitons prouver que la culture est un vecteur de changement durable, capable de renforcer la cohésion sociale et de créer des opportunités pour tous. »

Cette approche repose sur une vision inclusive, comme l’illustre le nom de l’association : Cultures &  Migrations. D’un côté, la culture, perçue comme un moteur de dialogue et d’épanouissement personnel. De l’autre, les migrations, qui rappellent que l’échange et la diversité sont des forces qui enrichissent les sociétés. Parmi les succès du programme, certains moments marquent particulièrement l’équipe du projet. L’un d’eux est la participation de 20 élèves issus d’un quartier vulnérable à une journée portes ouvertes de l'Institut Français de Kénitra, où ils ont pu participer à des ateliers culturels, des jeux éducatifs et un test de langue française. Un des élèves d’ABCDAIRE a même remporté une session de cours offerte par l’institut, une opportunité précieuse qui aurait été inaccessible sans cette initiative.

Les ateliers eux-mêmes sont souvent le théâtre de belles transformations personnelles. « Un jeune garçon, qui hésitait au début à dessiner, a progressivement pris confiance en lui en réalisant son premier dessin qu’il a fièrement montré à ses camarades », raconte Yasmine Bouchfar. « Une autre élève, timide et réservée, a commencé par murmurer ses histoires dans l’atelier contes, avant de finalement les raconter avec passion et assurance. » Ces exemples montrent que la culture n’est pas seulement un loisir, mais un véritable moyen d’émancipation et de valorisation de soi.

Un modèle pour un Maroc plus inclusif

Bien que lancé à Sidi Kacem et dans le cercle Cherarda, ABCDAIRE pourrait être reproduit dans d’autres régions du Maroc. L’équipe du projet réfléchit déjà à des évolutions possibles, notamment en élargissant la gamme des ateliers proposés et en renforçant les partenariats avec les institutions éducatives et culturelles. « Ce projet peut être dupliqué ailleurs, à condition de bien comprendre les besoins locaux et d’avoir le soutien des collectivités », précise Yasmine Bouchfar. « Nous voulons prouver que même avec un budget limité, il est possible d’avoir un impact concret sur l’éducation et la vie culturelle d’une région. ». Pour poursuivre cette dynamique, un film-documentaire réalisé par Anass Bouzammour a été produit afin de mettre en lumière l’impact du projet sur les bénéficiaires. Ce film, en cours de diffusion, vise à sensibiliser le public et à attirer de nouveaux partenaires pour pérenniser et étendre l’initiative.

Avec ABCDAIRE, l’Association Cultures et Migrations démontre que la culture peut être un moteur puissant d’inclusion et de développement. Ce projet, porté par une jeune association fondée en 2022, a su convaincre les partenaires locaux et mobiliser des ressources, malgré les défis financiers et logistiques.« Ce projet m’a appris que la culture est un droit humain fondamental. Il est inacceptable que des enfants, des jeunes et des femmes soient privés d’activités culturelles à cause de leur situation géographique ou économique », conclut Yasmine Bouchfar. « ABCDAIRE nous a montré que, même à petite échelle, des initiatives locales peuvent créer des changements profonds et durables. » Un message d’espoir et d’engagement qui résonne bien au-delà des frontières de Sidi Kacem, et qui, promet d'ouvrir la voie à d’autres projets similaires dans tout le Maroc.

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