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07.07.2023 à 18 H 10 • Mis à jour le 07.07.2023 à 18 H 10 • Temps de lecture : 4 minutes
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Paléontologie Une nouvelle espèce de requin préhistorique découverte au Maroc

Des scientifiques ont récemment publié un article dans le Swiss Journal of Paleontology pour décrire une toute nouvelle espèce de requin primitif, découverte au Maroc

La découverte est remarquable. Les requins, étant principalement cartilagineux, ont rarement leurs structures corporelles préservées sous forme de fossiles, encore moins s'ils datent du Dévonien supérieur, une époque où les requins commençaient tout juste à proliférer dans les océans anciens.


Christian Klug, auteur principal et conservateur de l'Institut paléontologique et du musée de l'Université de Zurich, a expliqué l'importance de la période du Dévonien dans l'histoire des océans, lorsqu'une course à l'évolution était en plein essor. « Avec une concurrence croissante entre les prédateurs qui peuplaient la colonne d'eau, l'organisme entier a été sélectionné pour plus d'efficacité », disait-il. « Cela a influencé les capacités de nage, l'appareil alimentaire, mais aussi les systèmes sensoriels, essentiels pour détecter les proies, s'orienter dans l'espace et échapper à des prédateurs encore plus grands comme l'énorme placoderme Dunkleosteus et le requin tout aussi imposant, Ctenacanthus », poursuit le spécialiste.


L'équipe de chercheurs a découvert plusieurs fossiles exceptionnellement bien préservés, incluant des tissus mous tels que des écailles, des muscles, le foie et des empreintes de vaisseaux sanguins, ou encore le tube digestif. La caractéristique la plus distincte de cette espèce bien préservée, des organes nasaux largement séparés, similaires à ceux des requins-marteaux actuels. Cette découverte suggère que le sens de l'odorat très développé des requins, ne date pas de l'histoire récente.


« Paradis des céphalopodes »

Les nouveaux fossiles proviennent des régions de Maïder et Tafilalet mondialement connues pour leurs richesses en terme de variétés fossiles. Wahiba Bel Haouz, co-auteur de l'étude et géologue à la Faculté des Sciences de l'Université Hassan II de Casablanca, citée par Arstechnica, décrit plusieurs sites marocains « célèbres parmi les collectionneurs de fossiles comprenant les strates fossilifères du Dévonien au Carbonifère inférieur ».


En plus des fossiles, les ammonites, les trilobites, les brachiopodes, les poissons et les coraux sont localement si abondants que des couches fossiles spécifiques ont été exploitées sur plusieurs kilomètres, laissant des tranchées visibles dans le désert. Les céphalopodes sont si abondants à de nombreux niveaux, même après des décennies d'exploitation commerciale intensive, que la région mérite d'être appelée un « paradis des céphalopodes », indique la même source.


Les fossiles de requins ont été découverts dans des dépôts remplis de mollusques fossiles, de crustacés, de poissons cuirassés (placodermes), de poissons cartilagineux (stems-chondrichthyens acanthodiens) et de poissons osseux (actinoptérygiens et sarcoptérygiens). Contrairement à d'autres poissons de la même époque et à la plupart des autres localités, les fossiles de ce site n'ont pas été aplatis malgré la pression géologique de plusieurs millions d'années.


L'équipe a nommé cette nouvelle espèce de requin « Maghriboselache mohamezanei », en hommage au Royaume, où elle a été découverte, et à l'une des personnes responsables de sa trouvaille, Moha Mezane. « Selache », c’est le mot grec pour le poisson cartilagineux.


Structure nasale révélatrice

Les fossiles de requins 3D exceptionnellement bien conservés ont permis aux scientifiques d'observer le neurocrâne d'un poisson ayant vécu il y a environ 350 à 383 millions d'années. Ils ont été surpris de découvrir que les capsules nasales étaient largement espacées.


Ces capsules nasales sont « vraiment surprenantes et excitantes », déclare Abdelouahed Lagnaoui, co-auteur de l'étude et professeur de stratigraphie et de paléontologie à l'École Supérieure de l'Éducation et de la Formation de l'Université Hassan Premier de Berrechid. Il s'agit d'une caractéristique inconnue chez les requins contemporains ou paléozoïques ultérieurs et pourrait même être la première du genre chez tous les vertébrés à mâchoires.


Pour comprendre ce que ces caractéristiques de Maghriboselache peuvent nous révéler, il est nécessaire de se pencher sur les requins d'aujourd'hui. Les recherches de Lauren Simonitis, chercheuse à la National Science Foundation et à l'Université de Washington, se concentrent sur la structure du nez des requins, son impact sur le flux d'eau à travers les narines, et comment ce flux peut affecter leur sensibilité olfactive.


Les fossiles nous aident à nous faire une idée plus réaliste des capacités des requins. Les requins sont « l'une de nos lignées les plus anciennes », relève la spécialiste.


Pour sa part, Aubrey Clark, biologiste et doctorante à l'Université de Floride, explique que trouver un fossile tel que Maghriboselache « nous permet d'aborder la question de la forme et de la fonction ». « Car dans un fossile, on observe la forme, mais on ne connaît pas forcément la fonction ».


Les fossiles restent au pays

Christian Klug, insiste sur le fait que la plupart de ces fossiles resteront dans leur pays d'origine, déclarant que le « holotype de Maghriboselache et certains des meilleurs squelettes sont déjà de retour au Maroc  ». Dans un pays riche en fossiles remarquables, Wahiba Bel Haouz espère non seulement que les musées locaux « exposeront certains des célèbres fossiles du Maroc », mais aussi que les habitants du Maroc en apprendront « davantage sur la richesse paléontologique du pays  ».


Simonitis et Clark quant à eux se sont montrés enthousiastes à propos de ce fossile miraculeusement préservé, une rareté pour un poisson dont la morphologie ne se prête pas à une survie à travers les âges. Pour eux, sa présence dans les riches gisements de fossiles du Maroc, similaires à ceux trouvés dans cette région, peut aider les spécialistes à comprendre les facteurs écologiques qui ont influencé cette évolution.



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