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04.07.2016 à 16 H 00 • Mis à jour le 04.07.2016 à 16 H 00
Par
Medias

Amnesty demande à l’Algérie de lever les restrictions contre la presse

Hassina Oussedik, présidente d’Amnesty Algérie. AMNESTY INTERNATIONAL
Les autorités algériennes doivent protéger, promouvoir et respecter la liberté des médias, a déclaré Amnesty International, à la suite d’une augmentation des restrictions imposées aux journalistes et aux médias indépendants ces derniers mois.

Le 28 juin 2016, Hamid Grine, le ministre de la Communication algérien, a prévenu les chaînes privées algériennes qu’elles devaient se conformer strictement à la Loi relative à l’activité audiovisuelle de février 2014, qui est particulièrement restrictive. Sa déclaration fait suite à la récente nomination par décret présidentiel des membres de l’autorité de régulation audiovisuelle, qui sera notamment chargée de l’octroi de licences aux stations de radio et de télévision privées. Plus tôt cette année, Hamid Grine avait déclaré que « la tolérance de l’État a des lignes rouges qu’il ne faut pas franchir ».


La Loi relative à l’activité audiovisuelle prévoit que les chaînes de télévision et de radios privées doivent obtenir une autorisation délivrée par l'autorité de régulation de l'audiovisuel avant de pouvoir commencer à diffuser. Elle ne précise pas le délai dans lequel les autorités doivent répondre aux demandes d'autorisation, et elle ne permet pas explicitement de contester les délais d'autorisation devant une autorité judiciaire, ce qui expose les chaînes au risque de censure par le biais de délais non raisonnables. Amnesty International a déjà appelé les autorités algériennes à modifier la loi et à la rendre conforme aux obligations et garanties constitutionnelles de l’Algérie en matière de droits humains.


Un vide juridique pour les chaines TV

Les licences de radiodiffusion sont difficiles à obtenir dans la pratique, et par conséquent, la grande majorité des chaînes privées de l’Algérie sont restées dans un vide juridique. Bien que largement tolérées par le gouvernement, ce dernier exerce une répression contre celles qui diffusent des propos critiques à l'égard des autorités. En mars 2014, les autorités ont fermé la chaîne privée Al Atlas TV. Il s’agissait apparemment de représailles contre cette chaîne qui avait couvert les protestations et les critiques de l’élection présidentielle d’avril 2014. Elles ont aussi fermé El Watan TV en octobre 2015, après que le ministère de la Communication eut annoncé publiquement son intention de déposer une plainte contre la station et son directeur pour une diffusion illégale comportant des passages subversifs nuisibles aux symboles de l’État.


Mehdi Benaissa, directeur de la chaîne de télévision privée Khabar Broadcasting Corporation (KBC) et de la société de production Ness Prod, Ryadh Hartouf, responsable de production chez KBC et Nora Nedjai, délégué au ministère de la Culture, risquent jusqu'à dix ans de prison pour avoir accordé des autorisations à deux émissions de télévision satiriques diffusées sur KBC. Mehdi Benaissa et Nora Nedjai ont été arrêtés le mercredi 22 juin 2016 et Ryadh Hartouf le lendemain. Ils ont comparu devant le procureur de la Cour de Sidi Mhamed, à Alger, le vendredi 24 juin 2016, et sont toujours en détention. Amnesty International demande la libération immédiate et inconditionnelle de ces personnes.


Ils ont été accusés en vertu de l’article 223 du Code pénal algérien, qui prévoit jusqu'à trois ans de prison pour fausse déclaration en vue d’obtenir un document public, et des articles 33 et 42 de la Loi 06-01 relative à la Corruption, qui prévoient jusqu'à 10 années d’emprisonnement et une amende de un million de dinars algériens (environ 8 000 euros) pour forfaiture. Amnesty International demande l’abandon des accusations visant les trois prévenus, lesdites accusations ne semblant résulter que de seules motivations politiques.


Les trois personnes ont été arrêtées après que des gendarmes eurent fermé le studio où KBC enregistrait son nouveau et très populaire talk-show, Ki Hna Ki Nass (« Nous sommes comme tout le monde » en arabe algérien) le 19 juin 2016, au motif qu’il avait été utilisé par Al Atlas. Toutefois, Amnesty International a rencontré des personnes qui ont affirmé qu’une autre chaîne de télévision avait pu utiliser les locaux sans problème. Le 23 juin 2016, des gendarmes ont fait une descente dans le studio où KBC enregistrait une autre émission satirique, Ness Estah, et ont ordonné aux producteurs d’arrêter de filmer. Les deux émissions, Ki Hna Ki Nass et Ness Estah, combinent la satire à des débats politiques et d’actualité. Amnesty International craint que KBC ne soit sanctionnée pour sa ligne éditoriale indépendante.


Une répression inquiétante

 Ces derniers mois, les restrictions imposées à la presse indépendante algérienne ont augmenté. Le 15 juin 2016, le Tribunal administratif de Bir Mourad Rais, près d’Alger, a ordonné le gel du rachat par Ness Prod du groupe El Khabar, qui comprend KBC et le quotidien arabophone El Khabar. Les avocats de la défense se sont par la suite retirés de cette affaire pour protester contre ce qu’ils considèrent comme une procédure entachée de vices de forme. Un responsable d’El Khabar a déclaré à Amnesty International qu’il craignait que la procédure n’ait été lancée en représailles contre la ligne éditoriale indépendante du quotidien, qui critique les autorités algériennes et en particulier le Président Abdelaziz Bouteflika, qui avait renouvelé sa candidature aux troisième et quatrième élections présidentielles.


Le ministre de la Communication algérien en personne s’était opposé au rachat, en invoquant la lutte contre les monopoles et les dispositions de la Loi relative à l’Information de 2012. Amnesty International estime que des mesures raisonnables de lutte contre les monopoles sont légitimes et que le pluralisme est indispensable pour assurer une presse dynamique et libre. Toutefois, la Loi relative à l’Information est indûment restrictive et resserre de fait le contrôle de l’État sur la presse écrite au moyen de réglementations drastiques sur les licences et la propriété. Le rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression s’est élevé contre l’utilisation des systèmes de licences pour la presse écrite et a souligné que ceux-ci ne devaient pas servir à la censure.


« Les autorités algériennes doivent harmoniser la législation nationale, y compris la Loi relative à l’Information, conformément à la nouvelle Constitution adoptée en février 2016 et à ses garanties en matière de liberté d’expression (notamment l’article 41-3 qui garantit la liberté des médias sans censure préalable). L’harmonisation des législations nationales avec la Constitution sera une bonne occasion d’examiner et de clarifier les dispositions législatives vagues, conformément au droit international relatif aux droits humains, en respectant notamment l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et l’article 9 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, à laquelle l’Algérie est partie », a conclu Amnesty International.


Avec Amnesty International

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