
n°115.Pourquoi le Maroc a dynamité une réunion ONU-UA à cause du Polisario
« Cette crise constitue un précédent énorme. Le Maroc a dynamité la réunion », rapporte le site londonien Middle East Eye citant un diplomate.
« Ni les négociations en coulisses, ni la menace de voir plusieurs délégations partir, ni la venue exceptionnelle du secrétaire général de la Commission économique pour l’Afrique (CEA, un organe des Nations unies) n’ont réussi à faire plier le Maroc », ajoute MEE, qui relate comment le Maroc a fait feu de tout bois pour tenter d'exclure la « RASD » d’une réunion conjointe entre la CEA et l’Union africaine vendredi dernier à Dakar.
Résultat, les 54 pays africains, les nations partenaires et les différentes organisations présentes dans la capitale sénégalaise ont du se résoudre à la décision du bureau CEA-UA de reporter sine die les travaux du conclave.
MEE ajoute que cette solution d’annuler tout bonnement la réunion avait pour objectif d’éviter que des soutiens du Polisario, à l’instar de l’Algérie, de l’Afrique du Sud ou du Nigéria auraient pu claquer la porte à leur tour et entrainer une crise profonde au sein des instances de l’UA.
Un casse-tête juridique insoluble
La « RASD » est membre de l’UA, mais pas de la CEA, ce qui a posé un problème d’interprétation juridique. Pour le Maroc, l’affaire est limpide : La RASD n’est pas reconnue en tant qu’Etat par les instances onusiennes, sa participation étant soumise à la primauté du règlement de l’ONU sur celui de l’Union africaine s’agissant d’une réunion conjointe explique en substance un diplomate spécialiste de ces questions à Telquel.ma.
Mais la CEA, poursuite le site d’information « a invoqué un autre avis en vertu duquel les territoires non autonomes peuvent être représentés ». D’où, la recherche d’un étrange compromis par la tentative d’habiliter la délégation du Polisario sous la bannière du « Sahara occidental ». Mais cette brèche a offert l’opportunité à une délégation marocaine composée d’élus locaux du territoire d’occuper le terrain selon Telquel.ma, se fondant sur leur droit de représentativité et sur le fait que le Polisario décharné de sa qualité « RASD » ne pouvait faire de même suivant la décision de la Cour de Justice européenne (CJUE) qui réfute au mouvement la qualité de représentant des populations du Sahara occidental…
L’Algérie a bien entendu tenu un raisonnement différent selon MEE : afin de contrer l’argument avancé par le Maroc, un diplomate algérien a affirmer que « siéger au sein d’une réunion multilatérale avec la « RASD » n’engage en rien la reconnaissance de celle-ci par la CEA ou l’ONU. L’Algérie siège bien à côté d’Israël lors de réunions onusiennes alors qu’elle ne le reconnaîtra jamais », reprenant en creux ce qu’avait avancé au Desk… le ministre délégué aux Affaires étrangères, Nasser Bourita pour expliquer que l’adhésion du Maroc à l’UA n’est pas à considérer comme une reconnaissance de facto de l’entité.
La situation était donc insoluble, la « RASD » ne pouvant se prévaloir de la reconnaissance de l’ONU d’une part et d'autre part l’incapacité de l’exclure étant membre de l'UA. Résultat, c’est tout le conclave qui a été annulé sans perspective d’issue consensuelle entre les parties.
Une attitude inflexible de Rabat
Le Maroc avait déjà boycotté une réunion du Conseil de paix et de sécurité de l’UA dédiée au Sahara et présidée par l’Algérien Smaïl Chergui. Une source diplomatique marocaine citée par Le Desk avait jugé cette réunion « improductive et à sens unique » pour justifier la politique de la chaise vise.
Désormais membre de l’Union africaine, le Maroc a donc décidé de pratiquer au sein de chaque réunion institutionnelle panafricaine une ligne dure et inflexible, ce qui augure de batailles incessantes contre ses adversaires, appliquant à la lettre sa promesse d’en découdre avec le Polisario à chaque occasion qui se présente.