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10.05.2016 à 15 H 05 • Mis à jour le 12.05.2016 à 09 H 12
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Médias

El Khalfi divise la majorité au sein du gouvernement sur les jeux de hasard

Mustapha El Khalfi, ex-ministre de la communication et porte-parole du gouvernement défend une ligne moralisatrice au référentiel islamiste. MONTAGE LE DESK
L’adoption du nouveau code de la presse est décidément dans l’impasse. En cause, la volonté tardive du ministre de tutelle d’étendre l’interdiction de la publicité pour les jeux de hasard à la presse écrite. Un débat houleux qui divise au sein de la majorité gouvernementale sur fond d’enjeux financiers.

C’est probablement un retour à la case départ pour le ministre de la communication, Mustapha El Khalfi, qui a fait de l’adoption du nouveau code de la presse son cheval de bataille et un dossier à mettre à son actif avant la fin de son mandat. Ce qui devait être une formalité s’est transformé en un blocage politique à peine déguisé.


En toile de fond le désaccord autour de l’article 62 du projet de code de la presse traitant de la publicité des jeux de hasard qui a fait voler en éclats les soutiens d’El Khalfi au sein de la majorité gouvernementale et rameuter les députés de l’opposition. Pourtant, sur l’essentiel de la loi, El Khalfi a mis de l’eau dans son vin en acceptant des propositions d’amendement provenant des partis de la majorité et de l’opposition, mais ne veut rien lâcher concernant les jeux de hasard, adoptant à ce propos une ligne idéologique dure en phase avec le référentiel religieux du PJD.

Jurisprudence, cohérence et conservatisme

D’abord, sur le plan légal, l’article 62 du projet du code de la presse s’appuie sur une logique de jurisprudence et de cohérence avec la loi 77-03 sur la communication audiovisuelle. Cette dernière stipule sans détours que « sont interdits les messages publicitaires contenant, explicitement ou implicitement, que ce soit par les images ou les propos, des scènes de violence ou contraires aux bonnes mœurs et à l’ordre public, des éléments pouvant encourager les abus, imprudences ou négligences ou pouvant choquer les convictions religieuses ou politiques du public… ».


Or, cette interprétation est justement considérée par les détracteurs d’El Khalfi comme l’expression du référentiel islamiste du PJD. Le second enjeu de cette interdiction est d’ordre économique, puisque les montants en jeu sont énormes, aussi bien pour la Marocaine des jeux et des sports (MDJS), qui a le monopole du secteur, que pour la presse écrite dont les revenus publicitaires dépendent grandement de cette manne.


Résultat, El Khalfi s’est heurté à une levée de boucliers des députés du PPS, du MP ainsi que le RNI qui ont exprimé leur opposition à cette disposition qualifiée de « prohibitive ». Mais, le ministre joue la montre et minimise la perspective d’une crise au sein du gouvernement : « Officiellement, je n’ai pas reçu une demande d’amendement de cette disposition dans le draft que j’ai entre les mains. L’article 62 est en discussion devant la commission qui est chargée de trouver un arrangement. Mais je reste persuadé que cette loi va passer », précise-t-il. Paradoxalement, El Khalfi a trouvé pour allié le président du Syndicat national de la presse marocaine (SNPM) : Abdallah Bekkali, député de l’Istiqlal, défend la mouture du ministre avec qui il partage une vision très conservatrice de la société.

Un activisme souterrain de la MDJS ?

Pour beaucoup, ce blocage de la dernière heure reste pour le moins illisible. « La révision de cette disposition ne faisait pas partie des amendements proposés par la majorité. Il aura fallu attendre la dernière ligne droite de l’adoption du projet du code la presse pour que le débat sur l’article 62 surgisse  », déclare, suspicieux, Abdellah Bekkali. Les enjeux financiers ont-il poussé la MDJS à exercer un forcing sur certains députés ?


La MDJS a réalisé en 2015 un chiffre d’affaires record de 1,847 milliards de dirhams, soit une progression de +12,5 % par rapport à 2014. El Khalfi avait obtenu l’interdiction de la publicité pour les jeux de hasard dans les médias audiovisuels publics poussant la MDJS à imaginer des campagnes publicitaires ingénieuses pour maintenir la visibilité de ses produits. C’est le cas de la campagne promotionnelle du sport « Le Maroc est notre terrain de jeu », financée à concurrence de 257 millions de dirhams ou encore le programme « nt7harko », une capsule diffusée depuis janvier 2016 sur la chaine 2M, pour inciter à la pratique du sport. « Une publicité déguisée pour contourner la censure des jeux de hasard à la télévision », commente un professionnel de la communication.

El Khalfi s’isole de la profession

Après s’être attiré les foudres de l’Association des radios et télévisions indépendantes (ARTI), l’article 62 du projet du code de la presse pénalisera aussi journaux et sites d’information. El Khalfi avait récemment prétendu que : « la publicité sur les jeux et l’alcool ne concerne qu’une marge insignifiante de la presse marocaine.  ». Par sa décision d’étendre l’oukaze à tout type de médias, il se met ainsi à dos une majorité de professionnels du secteur qui lui était pourtant acquise par ailleurs.


Du côté de la MDJS, le silence est de mise. Contacté par Le Desk, son directeur, Younes El Mechrafi, s’est borné à déclarer qu’il ne souhaite pas s’exprimer sur le sujet en ce moment. Rachid Roukban, député PPS et membre de la commission de l’enseignement, de la culture et de la communication, en charge de la finalisation du projet du code de la presse, préfère tempérer.« N’exagérons rien, l’article 62 fait partie d’un lot d’amendements et on trouvera un compromis qui arrange toutes les parties. Ce n’est pas la première fois que l’on va faire face à un débat autour d’un amendement  ». En clair, le PPS va monter au créneau pour faciliter les tractations dans les coulisses et trouver un équilibre entre, d’une part l’interdiction des jeux de hasard et d’autre part la sauvegarde des intérêts des entreprises de presse, dont la majorité est déjà en difficulté pour des raisons structurelles.

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