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18.09.2016 à 17 H 19 • Mis à jour le 19.09.2016 à 21 H 57
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Compte-rendu

La « marche spontanée » contre le PJD à Casablanca révèle la main cachée des autorités dans sa planification

Aucune organisation officielle ou parti politique n’a revendiqué l’organisation de cette manifestation soigneusement encadrée par les autorités locales et de nombreux agents d’autorité en uniforme ou en civil. REPORTAGE PHOTO AIC PRESS
Des populations peu au fait des enjeux de l’événement, déplacées grâce à un dispositif conséquent et encadrées par des agents d’autorité, du matériel de propagande uniforme, des slogans s’inspirant des thématiques récentes usitées contre Benkirane dans les médias hostiles à son parti, des corporations habituellement mobilisées dans pareilles circonstances…Peu de doute subsiste sur les promoteurs d’une manifestation voulue comme un « élan citoyen »

Annoncée hier en début de soirée sur les réseaux sociaux, une marche anti-PJD a eu lieu à Casablanca ce dimanche regroupant, selon les diverses estimations, quelques milliers de participants, dont de nombreux ont été convoyés par un important dispositif de transport, comprenant des autocars de compagnies privées, des bus scolaires réquisitionnés des écoles, ou des taxis habillés aux couleurs du drapeau national et à l’effigie du roi Mohammed VI, rappelant le même modus operandi que celui utilisé pour la manifestation organisée à Rabat contre Ban Ki-moon en mars dernier.



La thématique de la débauche et de l'atteinte aux bonnes moeurs est montée en épingle depuis le scandale des amants du MUR


Aucune organisation officielle ou parti politique n’a revendiqué l’organisation de cette manifestation soigneusement encadrée par les autorités locales et de nombreux agents d’autorité en uniforme ou en civil.


Le chef du gouvernement est présenté comme un politique à double visage, celui du politicien qui n'hésite pas à prendre des mesures libérales impopulaires et celui de l'islamiste au référentiel religieux rétrograde


Des associations sportives de quartier, notamment d’art martiaux, des ONG méconnues du grand public ou certaines corporations ouvrières et syndicales étaient représentées par grappes de quelques dizaines de personnes munies d’un arsenal de pancartes, de banderoles et de grandes toiles imprimées ressassant les mêmes messages reproduits quasiment à l’identique.



L'image d'Abdelilah Benkirane est systématiquement associéé à celle de son ex-ministre Lahbib Choubani, président de la région Draâ-Tafilalet dont la presse n'a de cesse de dénoncer ses dérives. Ici est mise en avant l'affaire des 4x4 dont il voulait équiper les dirigeants de sa région


Un groupe de personnes habillées en tenue traditionnelle sahraouie (deraâ), mais n’ayant pas l’accent hassani, ont expliqué doctement face aux caméras qu’ils étaient venus du grand sud pour exprimer leur attachement à l’union sacrée du pays derrière le roi « de Tanger à Lagouira », en fustigeant Abdelilah Benkirane de vouloir « jouer la carte de la division entre les composantes de la société marocaine ».


Les dirigeants du PJD sont accusés d'enrichissement personnel à travers des images comparant leur situation de militants de la Chabiba Islamiya durant les années 80 et leur statut de ministres du gouvernement


Abdelali Hamieddine, parlementaire du PJD et membre de son bureau politique est régulièrement accusé d'avoir participé à l'assasinat en 1993, à Fès, de Mohamed Benaïssa Aït Ljid, étudiant militant d'extrême gauche


Summum du populisme, une pancarte pour le moins élaborée a été remise à ce manifestant sur laquelle il est montré que Benkirane s'est payé une montre de prestige


L'affaire dite des amants du MUR a été particulièrement exploitée lors de cette marche pour souligner la dépravation des islamistes et leur double langage


Une banderole bleu-PAM met en avant l'opposition supposée de la Commanderie des croyants de Mohammed VI avec l'islamisme prôné par le PJD


Selon des témoignages recueillis sur les lieux et à travers des vidéos diffusées sur Internet, il est remarquable de noter que les participants à cette marche n’avaient pour la plupart aucune idée précise sur l’objet même de l’événement. Une femme exprime dans une vidéo toute sa reconnaissance à un agent d'autorité qui lui a procuré un mouton pour l'Aïd, raison pour laquelle elle n'a pas hésité à répondre à son appel pour cette marche.



Certains se sont bornés à répéter en chœur les messages imprimés qui leur avaient été distribués, à savoir « Non à l’immixtion de la religion en politique ! », « Benkirane dégage ! », « Les frères musulmans dehors ! ».


Des moyens logistiques conséquents ont été mobilisés pour cette manifestation. Ici des autocars de la société de transport CTM ayant servi à convoyer des manifestants de plusieurs régions du pays


Comme à l'accoutumée, la corporation des taxis était en première ligne arborant drapeaux nationaux, portraits à l'effigie du roi et slogans nationalistes


Des femmes à qui des médias ont tendu le micro, ont évoqué, pêle-mêle, l’insécurité grandissante qui règne à Casablanca, l’envolée des prix des produits de première nécessité, le chômage rampant ou encore la crise du logement.


Maitre-mot de ce rassemblement : Benkirane dégage ! Un message claironné sur de multiples pancartes et banderoles agrémentées de photographies du chef du gouvernement barrées d'une croix rouge


Exemple parmi d’autres, des jeunes en colère ont expliqué à travers une vidéo filmée dans l’autocar qui les a transportés sur les lieux de la manifestation qu’ils ont été mobilisés pour « manifester en faveur d’une jeune fille victime d’un viol par un Saoudien ». Dépités, ils y affirment avoir reçu une maigre somme d’argent en montrant à l’écran les restes « d’un repas moisi » qui leur a été distribué. « Nous n’avons rien à voir avec la politique, ni contre Benkirane ! », ont-il affirmé.



Nul doute que cette « marche spontanée » contre le PJD à Casablanca révèle la main cachée des autorités dans sa planification, son organisation et son exécution. Reste à savoir à qui profitera après-coup cette débauche insensée et contre-productive de moyens pour porter l'estocade à Benkirane et à ses partisans. A ses contradicteurs, le PAM en tête, ou à lui-même, donnant ainsi corps à son discours sur le tahakoum  ?

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