L’ancien ambassadeur du Maroc à Madagascar sous le coup d’une enquête pour « détournement de fonds »

Le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération a dépêché, lundi, une mission d'inspection à l’ambassade du Maroc à Antananarivo, suite à des informations « recoupées » sur des agissements de l’ancien ambassadeur à Madagascar, indique un communiqué relayé par la MAP qui ne cite pas son nom. Il s'agit de Mohammed Amar, doyen du corps diplomatique dans la Grande Ile qui occupait ce poste depuis dix ans. Son remplacement par Mohamed Benjilani avait été acté depuis deux mois à l'aune de la grande valse des ambassadeurs du royaume, mais celui-ci n'a présenté ses lettres de créance au président malgache que ce matin même.
Nouvel Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire du #Maroc à #Madagascar, SEM Mohamed Benjilani présente sa lettre de créance au PRM pic.twitter.com/HsyN1Fb74S
&mdash PrésidenceMadagascar (@PresidenceMada) November 21, 2016
Nouvel Ambassadeur du Royaume du #Maroc à #Madagascar : "le renforcement de la Coopération entre les deux pays" selon SEM Mohamed Benjilani pic.twitter.com/IOg52M9ezZ
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Une note d’information partagée par la présidence de la république malgache indiquait ce lundi qu’une cérémonie de présentation des lettres de créance du nouvel ambassadeur du Maroc devait se tenir en fin de matinée au palais d’État d’Iavoloha. Une note qui entérine le fait que la mission de Mohammed Amar, jusqu’ici, ambassadeur du royaume s'est donc officiellement achevée avec la visite d’État du roi Mohammed V à Madagascar. « La lettre de rappel avait été reçue par le ministère des Affaires étrangères depuis deux mois », confirme à la presse malgache une source diplomatique locale. L’information n’avait, pourtant pas filtré à Antananarivo jusqu’à hier. « En tant que doyen du corps diplomatique et francophone qui plus-est, l’on a souhaité qu’il ne quitte le pays qu’après le sommet de la Francophonie », ajoute la source.
En septembre dernier, Le360 indiquait, de sources sures, que Mohammed Amar, avait reçu des instructions pour rester sur place alors qu’il devait être réaffecté ailleurs. Son maintien était justifié par les préparatifs de la visite royale en marge de la tenue du 16ème Sommet de la francophonie. Mais à sa descente d'avion à Antananarivo, le roi Mohammed VI a été accueilli par Mohamed Benjilani, présenté comme ambassadeur du Maroc deux jours avant sa présentation des lettres de créance au président malgache.
Détournements de fonds, agissements discriminatoires
La décision d’envoi de la mission ministérielle, comprenant également des éléments de l’Inspection générale des finances (IGF), « fait suite à des informations recoupées selon lesquelles l’ancien ambassadeur à Madagascar aurait procédé notamment à des détournements de fonds à l’occasion d’opérations humanitaires décidées en faveur du peuple malgache », a indiqué le ministère dans un communiqué. L’ambassadeur aurait également entrepris « des actions d’ingérence dans les affaires intérieures du pays, en violation des usages diplomatiques et en contradiction avec la tradition diplomatique marocaine ancrée », ajoute le communiqué.
L’ancien ambassadeur du Maroc à Madagascar aurait aussi procédé à « des agissements discriminatoires à l’égard des communautés non-musulmanes du pays, sans respecter la diversité ethnique et religieuse de Madagascar, ni les valeurs d’ouverture et de tolérance prônées par la religion musulmane et portées par Sa Majesté le roi Mohammed VI, Commandeur des croyants », selon la même source..

Le départ de Mohamed Amar était prévisible notait la presse malgache, « étant donné qu'il était en poste à Madagascar depuis près de 10 ans, son départ, si l’on considère les normes diplomatiques ne devrait surprendre personne. La décision de le remplacer pourrait même être considéré comme tardive ».
Un ton moralisateur qui a déplu
La même presse relevait toutefois deux discours prononcés par l’ex- ambassadeur du Maroc, lors des banquets, au palais d’État d’Iavoloha. La dernière en date était, lors des présentations des vœux du 8 janvier 2016. Dans ses allocutions, « Mohammed Amar avait décrit sans ambages les difficultés socio-économiques à Madagascar, tout en déplorant l’impuissance, voire le manque de volonté étatique de redresser la situation », soulignait L’Express de Madagascar.
« La visite du roi Mohammed VI, dans la Grande île, affirme une volonté d’intensifier la coopération bilatérale et les relations amicales entre les deux pays. Ce qui semble imposer un changement d’angle et de ton diplomatique », ajoutait le même journal, décrivant « le ton moralisateur (…) et un style qui a déplu à l’administration Rajaonarimampianina », qui aurait milité pour son rappel.