Abdelhak Khiame livre son bilan et juge « piètre » la coopération inter-maghrébine
Le directeur du Bureau central d'investigations judiciaires (BCIJ), Abdelhak Khiame, a indiqué, dans un entretien accordé à l’agence MAP que cette structure a réussi à démanteler 40 cellules terroristes et à arrêter 548 personnes, depuis sa création en 2015, affirmant qu’elle a incontestablement prouvé son efficacité aussi bien à l’échelle nationale qu’internationale.
« Quelque 21 cellules ont été mises hors d’état de nuire en 2015 et 19 autres lors de l’année en cours, dont 4 cellules liées à la nébuleuse terroriste Al Faye Wa Al Istihlal, grâce à la politique proactive adoptée par le Maroc », a déclaré Khiame à la MAP.
Une stratégie « anticipative » contre Daech
Il a précisé que 36 de ces cellules sont liées à l’organisation terroriste auto-proclamée Etat islamique , relevant que, « dans le cadre de la stratégie anticipative du Royaume dans la lutte contre ce fléau destructeur, 548 personnes (275 en 2015 et 273 en 2016) ont été interpellées et déférées à la justice ».
« De 2015 à 2016, le BCIJ a procédé à l’arrestation de 71 individus qui ont regagné le Maroc en provenance des rangs de l’EI. Et sur les 47 personnes arrêtées en 2016, 39 proviennent de la zone de conflit syro-irakienne et 8 autres de la Libye », a-t-il ajouté.
Evoquant le cas des individus qui ont tenté de joindre les rangs de Daech, 3 personnes ont été arrêtées : 2 ayant tenté de se rendre en Libye et une vers la zone syro-irakienne, a noté Khiame, faisant savoir que ces prévenus ont tous été traduits devant la justice.
Le BCIJ qui a, d’autre part, traité cinq affaires liées au port d’armes, a présenté 22 ex-détenus, 14 femmes et 20 mineurs à la justice et procédé au refoulement de 27 personnes, a indiqué Khiame.
A propos de la lutte anti-terroriste à l’échelle nationale depuis 2002, il a déclaré que 167 cellules ont été démantelées, dont 46 étaient étroitement liées aux groupes actifs dans les zones de conflits aux côtés de Daesh.
Après avoir souligné que « 341 tentatives terroristes ont été mises en échec par les services de sécurité marocains », Khiame a signalé que sur les 2 963 individus arrêtés et déférés à la justice, 277 « avaient de lourds casiers judiciaires ».
Plus de 500 Marocains morts dans les zones de conflit
« Les combattants marocains ayant péri dans les zones de conflit sont au nombre de 553 personnes », a indiqué le directeur du BCIJ, exprimant « sa tristesse face au sort des jeunes innocents qui se font enrôler et endoctriner dès la fleur de l’âge dans des camps d’entraînement ».
« A travers leurs projets belliqueux, a-t-il fait savoir, les terroristes projetaient de perpétrer des attentats à l’explosif, commettre des assassinats et lancer des attaques à main-armée ».
Khiame a insisté sur « la restructuration et l’encadrement du champ religieux, la mise à niveau de la législation pénale et la lutte contre la précarité et l’exclusion sociale » citant à ce propos l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH) et le dispositif de sécurité renforcée Hadar.
« Cet engagement multidimensionnel du Maroc a été plus d’une fois salué par la communauté internationale, d’où l’élection du Royaume à la coprésidence du Forum global de lutte contre le terrorisme (GCTF), une importante plateforme qui regroupe plusieurs pays de différentes régions du monde pour promouvoir la coopération multilatérale, en appui aux efforts de l'ONU, pour le développement de la stratégie mondiale de lutte contre le terrorisme », s’est réjoui Khiame.
« Les résultats concrets de sa politique anticipative dans la lutte contre le terrorisme à travers le démantèlement de plusieurs filières de recrutement et d’enrôlement de jihadistes ou de cellules qui préparaient des actes terroristes font désormais du Maroc un partenaire sérieux et incontournable pour l’ensemble des pays de la région, voire du monde », a-t-il estimé.
Une collaboration « probante et efficace »
Il en veut pour preuve que le Royaume « est le seul pays de la région ayant adopté une véritable politique migratoire, tout en entretenant une coopération des plus exemplaires avec l’ensemble des partenaires qui a permis de déjouer plusieurs projets d’attentat dans différents pays, notamment européens ».
Khiame a, à cet effet, mis en avant « la collaboration probante et efficace du Maroc avec de nombreux pays, dont la France, l’Italie, les Pays-Bas, le Danemark, l’Espagne, la Belgique, les Etats-Unis d’Amérique et plusieurs autres du monde arabe et d’Afrique ».
« Grâce au travail de nos équipes, plusieurs projets d'attentats ont pu être déjoués à travers le monde entier. Outre la France, nous avons également fourni des renseignements à l'Italie, aux Pays-Bas, au Danemark et même en dehors de l'Europe et des Etats-Unis », a-t-il tenu à préciser.
Toutefois, Khiame a qualifié de « piètre », voire d’ « inexistante » la coopération dans la lutte contre le terrorisme au niveau du Maghreb, tout en mettant en garde contre les périls frontaliers qui guettent et menacent la région.
« L'Algérie refuse de coopérer avec nous. Pourtant, les périls qui menacent aujourd'hui de frapper la région sont transfrontaliers. Il est donc important de collaborer. A mon avis, il existe tout un effort à déployer au niveau interarabe et pas seulement à l’échelle du Maghreb », a-t-il estimé.
« L'Organisation Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) contrôle toute la partie australe de l'Algérie. Au vu de cette situation, ce pays a intérêt autant que nous à coopérer », a-t-il affirmé, avançant que « la situation créée par l'Algérie avec Tindouf et les milliers de personnes séquestrées et abandonnées à leur propre sort, en proie à la pauvreté, à l’indigence et au dénuement le plus honteux, joue un rôle fondamental dans le ravitaillement des filières jihadistes dans la région ».
Avec MAP
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