Moody’s Ratings confirme la note Ba1 du Maroc et maintient ses perspectives stables
Moody's Ratings (Moody's) a confirmé le 27 septembre les notes d'émetteur à long terme et de dette senior non garantie du gouvernement marocain, Ba1. « Les perspectives restent stables », commente l’agence de notation internationale.
La confirmation des notes Ba1 reflète les atouts institutionnels du Maroc et sa solide position extérieure, ainsi que les faibles niveaux de revenus et les défis socio-économiques qui limitent la stratégie d'assainissement budgétaire du gouvernement, avance Moody’s.
Ces derniers rendent difficile pour les autorités de commencer à se désendetter tout en répondant à la forte demande sociale et aux besoins d'investissement essentiels pour le programme politique du gouvernement et le développement du pays, qui, malgré les progrès, est en retard par rapport à ceux des pays ayant une note similaire, poursuit l’agence.
Les perspectives stables reflètent l’attente de Moody’s que le gouvernement poursuive les réformes économiques et sociales pour améliorer la résilience de l'économie aux chocs tout en maintenant la charge de la dette stable. L’agence s’attend à ce que le gouvernement poursuive ses efforts d'assainissement budgétaire face à la pression des dépenses due aux réformes de la sécurité sociale et à un vaste pipeline de projets d'infrastructures ainsi qu'à une exposition continue aux chocs, notamment ceux liés au climat.
Les plafonds nationaux du Maroc restent inchangés, constate Moody’s : le plafond de la monnaie locale reste à Baa1, trois crans au-dessus de la notation souveraine, reflétant des institutions prévisibles et un faible risque de vulnérabilité externe, équilibré par une forte présence du secteur public.
Le plafond de change à Baa2, un cran en dessous du plafond de la monnaie locale, reflète des risques de transfert et de convertibilité relativement modestes malgré l'existence de contrôles des capitaux, cohérents avec le système de taux de change encore principalement fixe, et prend en compte la politique de libéralisation progressive du taux de change initiée en janvier 2018, même si ce processus se déroulera à un rythme lent, poursuit la même source.
Le Maroc bénéficie d'institutions solides et d'une efficacité politique avérée, démontrant de solides capacités de gestion de crise lors de chocs externes importants. Cette résilience met en évidence la robuste gouvernance et le cadre institutionnel du pays, se félicite Moody’s.
Le Maroc a montré une capacité constante à promulguer la législation nécessaire, contribuant à un environnement de gouvernance stable et efficace. Les politiques monétaires et macroéconomiques du Maroc sont marquées par le bilan de Bank Al-Maghrib (la Banque centrale) en matière de maintien de la stabilité des prix, ce qui a renforcé la crédibilité de la politique monétaire. Cette stabilité est soutenue par une approche contrôlée de la libéralisation du taux de change, abonde Moody’s.
La politique budgétaire du Maroc reflète un équilibre entre le maintien de la discipline budgétaire et la lutte contre les pressions sociales et externes. Le gouvernement a mis en œuvre des politiques macroéconomiques cohérentes et des réformes budgétaires visant à améliorer la santé, l'éducation et la protection sociale, tout en améliorant la collecte des recettes et la gouvernance dans le secteur public, constate-t-on.
Une stratégie budgétaire garantissant une dette stable
Moody’s prévoit que la dette publique restera globalement stable à environ 65 % du PIB au cours des prochaines années, alors que le gouvernement continue de trouver un équilibre entre la poursuite du développement économique et social et les efforts de consolidation budgétaire.
La stratégie budgétaire à moyen terme du gouvernement vise à faire face à des dépenses plus élevées en matière de santé et de sécurité sociale, estimées à 2,3 % du PIB pour 2024, sans détérioration du solde budgétaire grâce à la suppression progressive des subventions énergétiques et à des recettes plus élevées. En outre, le gouvernement entend conclure des partenariats public-privé avec le secteur privé pour atténuer l'impact budgétaire des grands projets d'infrastructures liés à la Coupe du monde 2030, à la Coupe d'Afrique des Nations 2025, aux efforts de reconstruction post-séisme et aux investissements liés au changement climatique, estime Moody’s.
L’agence s’attend à ce que le déficit primaire du gouvernement se stabilisera autour de 2 % du PIB à moyen terme, équilibrant un contexte macroéconomique favorable avec une croissance rebondissant à 4 %, contre une pression évidente sur les dépenses primaires provenant des dépenses d'investissement récurrentes et à grande échelle. Cela conduira à une consolidation budgétaire plus progressive par rapport à l'objectif du gouvernement d'atteindre un déficit primaire de 0,6 % en 2026, note-t-on. Grâce aux coûts d'emprunt favorables du Maroc, Moody’s prévoit que le déficit budgétaire diminuera modestement de 4,2 % du PIB en 2024 à 3,8 % en 2026 et que la dette publique se maintiendra à 65 % du PIB.
De nombreuses contraintes sociales au crédit
Le Maroc est confronté à des défis pour atteindre une croissance et une création d'emplois durables, entravés par des disparités économiques et sociales persistantes. Ces disparités contribuent à limiter les perspectives du pays de croître plus rapidement et d'atteindre des niveaux de revenus plus élevés, souligne Moody’s. De larges segments de la population tels que les femmes, les jeunes et les personnes vivant dans les zones rurales du Maroc ont un accès limité aux opportunités d'emploi, à l'éducation et aux services de santé, ajoute la même source qui détaille en chiffre :
Le niveau de revenu du Maroc s'élevait à 10 460 dollars en termes de PPA en 2023, ce qui est faible en termes absolus et bien inférieur à la médiane Ba1 de 27 316 dollars.
Les fortes disparités géographiques, notamment entre les zones urbaines et rurales, continuent d’alimenter les inégalités. Le marché du travail est caractérisé par un taux élevé d’informalité (36 % selon l’OCDE), un chômage des jeunes important (27 %) et une faible participation des femmes (19 % contre 69 % pour les hommes).
Malgré la mise en œuvre de réformes structurelles visant à relever ces défis, les progrès devraient être progressifs. Le Maroc fait progresser sa diversification économique dans des industries à plus forte valeur ajoutée et renforce son rôle dans la chaîne de valeur mondiale, tout en accordant la priorité aux investissements dans les énergies renouvelables et la conservation de l’eau, relève l’agence.
Des risques équilibrés
Les perspectives stables reflètent des risques équilibrés autour de notre scénario de base, qui prévoit une approche progressive continue des réformes économiques et sociales et une charge de la dette publique stable. Les risques à la baisse découlent d’une matérialisation plus lente des implications positives de ces réformes sur le crédit, notamment un rythme plus lent, voire l’abandon de la consolidation budgétaire face à des chocs potentiels ou à une pression accrue sur les dépenses. La libéralisation économique limitée du Maroc et sa dépendance à l'égard des oligopoles dominés par l'État pourraient s'avérer un obstacle important à une croissance plus élevée et plus inclusive. Dans un scénario plus positif, ces réformes entraîneraient des améliorations de crédit beaucoup plus rapides, avec une consolidation budgétaire plus rapide et un renversement de la tendance du fardeau de la dette publique ainsi qu'une accélération soutenue de la croissance économique.
Une vulnérabilité face aux risques environnementaux et sociaux
Le score d'impact de crédit ESG (environnemental, social et de gouvernance) du Maroc de 4 reflète sa vulnérabilité aux risques environnementaux et sociaux. Malgré la solidité de la gouvernance marocaine, la résilience du pays aux risques environnementaux et sociaux est limitée par la faible richesse et les niveaux élevés d'endettement, soutient l’agence.
Le profil de crédit du Maroc est exposé aux risques environnementaux, comme le reflète son score de profil d'émetteur E-4. L'exposition au risque climatique physique est élevée et reflète principalement la pénurie d'eau du souverain qui entraîne une diminution des réserves d'eau souterraine et une forte dépendance à l'agriculture pluviale. Le secteur primaire représente 10 à 15 % du PIB et environ 35 % de l'emploi total et contribue à un modèle de croissance volatile, augmentant la sensibilité de l'émetteur aux risques environnementaux, se prononce l’agence.
L'exposition aux risques sociaux (profil d'émetteur S-4) reflète des marchés du travail rigides qui limitent les opportunités d'emploi, y compris pour les jeunes instruits. Le Maroc sous-performe également en termes d'éducation par rapport aux autres pays, ce qui se traduit par de grandes disparités entre les résultats des écoles publiques et des écoles privées coûteuses. Un degré élevé d'inégalité entre les sexes, reflété par le très faible taux de participation des femmes au marché du travail, et un chômage élevé des jeunes représentent des contraintes structurelles sur le potentiel de croissance du Maroc, alerte l’agence de notation.
La gouvernance ne présente pas de risque particulier (profil d'émetteur G-2). L'efficacité des politiques reflète les politiques macroéconomiques cohérentes du gouvernement et les réformes budgétaires qui ont été mises en œuvre au cours des dernières années, notamment la suppression de la plupart des subventions aux carburants, la promulgation d'une réforme paramétrique des retraites publiques et le passage à la production d'énergie renouvelable. Cependant, la gouvernance est limitée par la faiblesse de la voix et de la responsabilité et par le ratio d'endettement élevé qui réduit la capacité financière du gouvernement à faire face aux risques environnementaux et sociaux, s’inquiète l’agence.
Le 24 septembre 2024, un comité de notation a été convoqué pour discuter de la notation du gouvernement du Maroc. Les principaux points soulevés au cours de la discussion étaient les suivants, rapporte la même source : les fondamentaux économiques de l'émetteur, y compris sa solidité économique, n'ont pas changé de manière significative les institutions et la solidité de la gouvernance de l'émetteur n'ont pas changé de manière significative la gouvernance et/ou la gestion de l'émetteur n'ont pas changé de manière significative la solidité fiscale ou financière de l'émetteur, y compris son profil d'endettement, n'a pas changé de manière significative.
Les facteurs susceptibles d’impacter la notation
Les réformes économiques qui augmentent les niveaux de revenus à un rythme plus rapide, augmentent la création d'emplois formels et réduisent les disparités socio-économiques influenceraient positivement la notation. Une croissance tendancielle plus élevée dans le secteur non agricole stimulerait les niveaux de revenus relativement faibles du Maroc, estime l’agence. Et d’ajouter : ces améliorations ouvriraient de plus grandes opportunités de génération de revenus et de consolidation budgétaire, ce qui entraînerait probablement une tendance à la baisse de la dette publique.
Une augmentation plus forte et plus soutenue du fardeau de la dette publique du Maroc exercerait une pression à la baisse sur le crédit, prévient Moody’s. Cela pourrait être le résultat d'un choc futur ou de demandes de dépenses plus importantes que prévu actuellement, liées à des projets d'infrastructures de grande envergure ou à des réformes ambitieuses de la sécurité sociale, ajoute-t-elle. La cristallisation des risques de passif éventuel émanant des entreprises publiques ou du secteur bancaire affaiblirait également la solidité budgétaire du Maroc et pèserait sur la notation en conclut Moody’s.
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