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21.06.2025 à 18 H 47 • Mis à jour le 21.06.2025 à 18 H 47 • Temps de lecture : 5 minutes
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Festival A Essaouira, le souffle des Gnaouas, écho du monde

Essaouira a vibré au rythme des qraqeb et des voix ancestrales à l’occasion de la 26ᵉ édition du Festival Gnaoua et Musiques du Monde, rendez-vous emblématique où les traditions spirituelles se mêlent aux sonorités contemporaines. Fidèle à son esprit d’ouverture, le festival a une fois de plus transformé la cité atlantique en carrefour des cultures, offrant une célébration vivante et universelle de la mémoire gnaouie

Devenue au fil des années l’un des événements musicaux les plus emblématiques du continent africain, la 26e édition du Festival Gnaoua et Musiques du Monde d’Essaouira a une nouvelle fois transcendé les frontières, affirmant la vocation singulière de la cité des Alizés à conjuguer les héritages spirituels aux langages artistiques les plus contemporains. Trois jours durant, les ruelles de la médina, les scènes de la plage et la mythique place Moulay Hassan ont vibré au rythme des qraqeb, du guembri, des ouds envoûtants et des voix d’Afrique, d’Orient et d’ailleurs.


Portée par l’élan d’une ville ouverte sur l’Atlantique, cette édition, placée sous le Haut patronage du Roi Mohammed VI, a réuni 350 artistes, dont 40 maâlems gnaoua, dans une célébration vivante de la diversité culturelle, de la transmission des savoirs et du dialogue des musiques.


Une ville transfigurée, un festival enraciné

Depuis plus de deux décennies, Essaouira réinvente à travers ce festival une mémoire musicale faite de spiritualité, de transe et de partage. Les scènes du festival deviennent les vecteurs d’une rencontre, entre générations comme entre continents. Cette 26e édition a été fidèle à cet esprit, donnant à voir une programmation éclectique et audacieuse, où les maâlems gnaoua côtoient artistes de renom, figures de la scène alternative et talents émergents.


La scène de la plage a été le théâtre d’une fusion mémorable entre l’esprit gnaoua et les rythmes amazighs. Le maâlem Abdelkbir Merchane a ouvert la soirée avec une puissance rituelle intacte, enchaînant les classiques du répertoire gnaoui avec ses musiciens et danseurs, entraînant le public dans une transe collective.


La magie s’est prolongée avec le maître tunisien du oud, Dhafer Youssef, dont le jazz spirituel a enveloppé la scène d’une atmosphère céleste, suspendue entre virtuosité et méditation. Moment d’exception : la fusion entre Dhafer Youssef, le maâlem Morad El Marjani et Abdelkbir Merchane, dialogue subtil entre oud méditatif et percussions ancestrales, salué par de longues ovations.


Voix africaines, puissances féminines

La chanteuse malienne Rokia Koné a enflammé la scène avec sa voix vibrante et son instrumentation métissée, entre traditions mandingues et guitares électriques. Dans un registre tout aussi puissant, la jeune maâlema Asmaa Hamzaoui, figure montante de la scène gnaoua féminine, a partagé la scène avec les musiciennes maliennes Bnat Timbuktu. Cette rencontre inédite a donné naissance à une fusion transsaharienne pleine de fraternité et d’audace, célébrée par un public conquis.


Le final de la première soirée a été confié au Nigérian CKay, phénomène de l’afrobeats, dont les tubes planétaires ont fait danser la foule sur des sonorités modernes et planétaires. R’n’B, highlife, électro : une clôture éclatante et festive qui a résumé l’esprit du festival, toujours en quête de nouvelles hybridations musicales.


Entre traditions et audaces : les pépites de la scène gnaoua

Le festival a mis en lumière la vitalité de la relève gnaoua. Le jeune maâlem Driss Essamlali a donné le coup d’envoi avec une interprétation fidèle mais résolument personnelle de la tradition. Mehdi El Kordoudi a poursuivi avec intensité, insufflant une énergie nouvelle au répertoire gnaoui. Les applaudissements nourris du public ont souligné l’engagement de cette nouvelle génération dans la transmission vivante de l’art gnaoua.


Autre temps fort : la performance du groupe Ribab Fusion, mené par Foulane Bouhssine, virtuose du ribab. En revisitant les chants amazighs d’« Ismkan » avec des accents blues, reggae et funk, le groupe a redonné à cet instrument monocorde une vie électrique et cosmopolite.


Les maâlems Mustapha Baqbou et Najib Oublaqas ont incarné une passerelle générationnelle forte. Le premier, pionnier des fusions musicales, a trouvé en Oublaqas un écho jeune mais respectueux des codes, dans une performance émouvante et moderne à la fois.


Enfin, la prestation de Fahd Benchemsi &  The Lallas, fusionnant gnaoua, gospel, jazz et soul, a électrisé la scène et conquis toutes les générations. Benchemsi, multi-instrumentiste passionné, propose une lecture actuelle et ambitieuse de l’héritage gnaoua, enracinée mais audacieusement réinventée.


Le Forum des droits humains, pilier de réflexion

En parallèle des concerts, la 12e édition du Forum des droits humains, organisée en partenariat avec le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME), a approfondi la réflexion autour du thème « Mobilités humaines et dynamiques culturelles ». Tables rondes, débats et interventions ont réuni artistes, intellectuels, diplomates et militants autour de la richesse des trajectoires migratoires, des enjeux de dignité, de mémoire et de représentation.


La rencontre, qui a vu la présence d’André Azoulay, conseiller du Roi et président de l’Association Essaouira-Mogador, de Neila Tazi, productrice du Festival, et de Driss El Yazami, président du CCME, a souligné la nécessité de revaloriser l’apport des diasporas dans la construction culturelle des sociétés modernes. Le débat a notamment mis en lumière l’enjeu des récits inclusifs, capables de déconstruire les stéréotypes et de bâtir des ponts entre les mémoires du Nord et du Sud.


Berklee, transmissions et futures étoiles

Autre axe fort du Festival : le programme « Berklee at Gnaoua and World Music Festival ». Fruit d’un partenariat entre le prestigieux Berklee College of Music et le festival, cette initiative pédagogique offre à de jeunes musiciens une immersion exceptionnelle, tous styles confondus, avec pour seul point commun l’excellence et la passion. Un levier puissant de transmission, de professionnalisation et d’ouverture à l’international.


L’impact du Festival Gnaoua dépasse largement le cadre artistique. Il insuffle une dynamique économique majeure à Essaouira, stimule l’artisanat local, les métiers du tourisme et l’image internationale de la ville. À travers ce rendez-vous, la cité se réinvente comme pôle de convergence des identités et carrefour des imaginaires.


À l’image du Maroc contemporain, le Festival Gnaoua reflète un pays multiple, en dialogue constant entre tradition et modernité, mémoire et innovation. Un Maroc qui écoute ses racines tout en tendant l’oreille vers le monde.

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