Le Maroc s’élève contre la loi américaine sur le 11-Septembre en solidarité avec les monarchies du Golfe

Suite à l’adoption vendredi dernier par le Congrès des Etats-Unis du projet de loi « Justice contre les sponsors d’actes terroristes » (JASTA), le Maroc souligne que « cibler et stigmatiser des Etats - amis des Etats-Unis- est de nature à fragiliser les efforts internationaux, y compris américains, en matière de lutte contre le terrorisme », indique ce mardi le ministère des Affaires étrangères et de la coopération dans un communiqué relayé par la MAP.
La loi en question autorise les proches des victimes des attentats du 11-Septembre à poursuivre des pays soupçonnés d’avoir soutenu ces attaques contre les Etats-Unis, notamment l’Arabie saoudite, alliée de Washington, mais pays natal de 15 des 19 pirates de l’air du 11-Septembre. A noter qu’aucune implication de l’Arabie saoudite dans ces attentats n’a jamais été démontrée.
Des poursuites devant la justice américaine
La JASTA permet que des poursuites soient engagées devant des tribunaux fédéraux des pays étrangers afin d’obtenir des indemnisations, si leur responsabilité était prouvée, provoquant une levée de bouclier de Riyad, mais aussi de ses partenaires au sein du Conseil de coopération du Golfe (CCG). Le Qatar et les Emirats arabes unis, ont publié lundi des communiqués séparés pour contester la loi. Le communiqué de Rabat, membre officieux du club des monarchies du Golfe, leur emboite le pas et vient ainsi exprimer une position en solidarité de cette alliance.
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Le secrétaire général du CCG, Abdellatif Zayani, a exprimé hier « la profonde inquiétude » des six membres du groupe après l’adoption par le Congrès de cette loi « qui contrevient aux fondements et aux principes des relations entre les Etats, notamment l’immunité souveraine des Etats ». Il a également souhaité que l’administration américaine « n’entérinera pas cette loi (…), qui créera un grave précédent » et « aura un impact négatif sur les relations entre les Etats, dont les Etats-Unis ». Une telle loi « aura des incidences négatives sur la coopération internationale pour la lutte contre le terrorisme », a prévenu le ministre des affaires étrangères émirati, cheikh Abdallah Ben Zayed Al-Nahyane.
Un engagement des Etats arabes souligné par Rabat
En écho, « le royaume du Maroc, qui condamne le terrorisme sous toutes ses formes et quelles qu’en soient les manifestations, s’est toujours inscrit dans la lutte de la Communauté internationale contre ce fléau », indique le ministère, affirmant que « l’engagement volontariste des Etats demeure la clé de voute du combat international contre le terrorisme et l’extrémisme violent. Cet engagement devrait être consolidé et encouragé ».
« Après les attentats du 11 septembre 2001, des Etats arabes, notamment de la région du Golfe, ont fait preuve d’un engagement particulièrement fort, en soutenant moralement, militairement et financièrement les efforts internationaux, y compris américains, en matière de lutte contre le terrorisme », indique la même source. Le Maroc a même participé au programme de détention secret de la CIA. Les monarchies du Golfe participent à la coalition internationale qui, sous la conduite des Etats-Unis, combat les jihadistes du groupe Etat islamique en Irak et en Syrie.
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« Les auteurs des actes terroristes doivent être rendus responsables de leurs actes abjects devant la justice. Mais en aucun cas, les actes terroristes de certains individus isolés ne peuvent être reprochés à leur pays d’appartenance, d’autant que ces individus agissent contre la sécurité et les intérêts de ce même pays. On ne peut, donc, faire l’amalgame entre les actes imputés à des individus isolés, et la responsabilité des Etats. Un tel amalgame reviendrait à remettre en cause toute l’histoire de l’humanité », souligne la diplomatie marocaine.
La loi a été approuvée à l’unanimité par la Chambre des représentants américaine, quatre mois après avoir été adoptée par l’ensemble des sénateurs. Le président Obama pourrait cependant refuser de ratifier le texte parce qu’il contredit le principe d’immunité judiciaire des Etats. Une ligne défendue par Rabat : « Le Maroc appelle au respect par tous des principes consacrés dans la Charte des Nations Unies. Il rappelle, également, le principe de l’immunité juridictionnelle des Etats, qui est bien établi en Droit international et qui demeure essentiel à des relations internationales sereines », conclut la même source. Mais l’adoption de la loi par les deux chambres contrôlées par les républicains laisse présager que le veto du président pourrait être à son tour révoqué par les élus, moyennant deux tiers des voix.