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31.12.2019 à 08 H 35 • Mis à jour le 31.12.2019 à 11 H 43 • Temps de lecture : 4 minutes
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n°552.Omar Radi emprisonné pour «un tweet contre l’injustice de la justice»

Contre la censure des voix libres et pour la liberté de la presse, des centaines personnalités signent une tribune en soutien à Omar Radi, journaliste marocain placé en détention jeudi 26 décembre pour avoir publié un tweet dénonçant une décision de justice contre des membres du Hirak. Le Desk publie à l’instar d’autres publications la tribune de soutien initialement parue sur Le Monde (en français) et Akhbar Al Yaoum (en arabe)

Omar Radi, un journaliste marocain de 33 ans, dort en prison depuis jeudi 26 décembre pour un tweet publié neuf mois auparavant. Nous, journalistes de tous horizons, intellectuels, penseurs, artistes et citoyens soucieux de défendre la liberté de la presse et d’opinion, tenons à lui exprimer notre soutien face à ce qu’il a toujours dénoncé : la condamnation et l’incarcération arbitraire d’activistes et de journalistes pour leur prise de position en faveur de la justice sociale et pour le respect des droits humains.


Les faits remontent au mois d’avril. A cette période, un juge de la Cour d’appel de Casablanca avait confirmé des peines allant jusqu’à 20 ans d’emprisonnement à l’encontre de 42 membres du Hirak, un mouvement de contestation sociale qui a agité le nord du Maroc en 2016 et 2017. Omar Radi avait alors dénoncé la cruauté de cette décision.


Convoqué une première fois, le 18 avril 2019, par la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ), il avait défendu son droit à l’expression libre et sa liberté d’opinion, garantis par la Constitution marocaine et les conventions internationales ratifiées par le royaume, notamment le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Mais à l’occasion de sa seconde convocation, le 26 décembre 2019, Omar a été déféré devant le procureur d’Aïn Sebaâ et le juge a alors ordonné sa poursuite sur la base de l’article 263 du Code pénal pour outrage à magistrat, refusant par ailleurs sa demande de liberté provisoire alors même qu’elle était justifiée par son état de santé. Emprisonné juste pour un tweet contre l’injustice de la justice.


Notre Editorial  : Solidaires avec Omar


Cette affaire, qui survient seulement quatre mois après l’arrestation de la journaliste Hajar Raïssouni, met en lumière des manquements graves à la liberté de la presse et d’opinion au Maroc. Une nouvelle fois, c’est un journaliste qui couvre les sujets liés à l’injustice sociale, à la corruption et aux droits humains qui est visé. Ses enquêtes rigoureuses, saluées notamment par un prix du journalisme d’investigation IMS-AMJI, lui ont déjà valu par le passé l’hostilité des autorités marocaines. En 2017 par exemple, il avait été arrêté puis relâché par les autorités marocaines durant la préparation d’un documentaire sur les mouvements sociaux au sein de la ville d’Al Hoceïma (Hirak du Rif : la mort plutôt que l’humiliation).


Au-delà de la poursuite de Omar Radi, nous voulons souligner que l’exercice de la liberté d’expression au Maroc connaît de graves restrictions. Après une année 2018 qui a vu six journalistes injustement condamnés à de la prison ferme pour leur couverture du Hirak, l’étouffement des voix les plus libres du pays se poursuit. Plusieurs procès récents pour délit d’opinion sont ainsi engagés ou ont déjà été jugés, essentiellement au pénal. Et ces lourdes pressions exercées par les autorités concernent également les libertés sur Internet.


Le même jour où Omar a été placé en détention, un youtubeur connu sous le nom de « Moul Kaskita » a été condamné à quatre ans de prison pour « offense au roi ». Quelques jours auparavant, un lycéen s’est vu infliger trois ans de prison pour avoir posté sur Facebook une publication reprenant la chanson du rappeur Gnawi, lui-même condamné à de la prison ferme pour une « atteinte à un corps constitué ».


Les mesures coercitives contre la liberté de la presse et le droit d’informer se sont multipliées ces derniers mois. Les poursuites engagées contre des journalistes, des blogueurs ou de simples internautes, ainsi que le délai de latence qui s’est écoulé entre la première convocation de Omar Radi et la réactivation de la plainte nous permettent de supposer que son arrestation se situe dans le sillage d’une large campagne visant à restreindre les libertés d’expression et d’opinion des citoyens marocains.


Quand on songe que Omar Radi est désormais emprisonné pour avoir dénoncé l’absence de dignité des fonctionnaires de justice qui emprisonnent les manifestants du Hirak en se justifiant de ne faire qu’« exécuter les ordres » (du pouvoir ?), la justice marocaine confirme pour le moins par l’emprisonnement du journaliste l’indignité dont celui-ci l’accuse.


Selon l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, la liberté d’opinion et d’expression ne doit connaître ni obstacle, ni frontière. C’est pourquoi l’arrestation de Omar Radi n’est pas seulement l’affaire des Marocains. Elle doit susciter l’indignation de toute personne attachée aux droits humains les plus fondamentaux, partout dans le monde.

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