La diplomatie marocaine et la DGED mises à nu
Le compte anonyme « Chris Coleman » a sévi sur les réseaux sociaux entre septembre 2014 et mars 2015. Les hackers ont emprunté le surnom du directeur adjoint du département des affaires politiques de l’ONU chargé de l’Afrique du nord et de l'ouest, Christopher Coleman (aujourd'hui en poste au Kosovo), mais leur identité réelle n’a jamais été dévoilée.
Les documents fuités – emails et câbles diplomatiques - probablement obtenus grâce à un simple piratage des messageries privées de diplomates et de responsables marocains, ont été agrémentés de « notes de synthèse » rédigées par les hackers et de commentaires en ligne. Avec un seul objectif affiché : celui de « déstabiliser » le royaume. A l’opposé du rôle d’un lanceur d’alerte comme Julian Assange ou Edward Snowden, auxquels « Chris Coleman » a parfois été comparé.
Outre la guerre larvée avec le voisin algérien, l’Etat menait pendant cette période un double bras-de-fer avec ses principaux alliés. D’abord avec la France sur les relations bilatérales, suite à la suspension de la coopération judiciaire et sécuritaire décidée par Rabat en février 2014. Ensuite avec Washington et le Secrétariat de l’ONU sur la question du Sahara. Dans ses rares sorties médiatiques sur l’affaire Coleman, le ministre des Affaires étrangères Salaheddine Mezouar a soupçonné la France puis l’Algérie, alors que Ahmed Charai a directement pointé du doigt une « barbouzerie » des services algériens. Une version qu'il maintient aujourd'hui. Il en veut pour preuve un PV de la police française, consulté par Le Desk, qui indique que le ou les hackers ont utilisé une adresse IP localisée en Algérie pour se connecter au compte Twitter de « Chris Coleman » selon les informations fournies à la police par le réseau social, bien que l'origine géographique d'une adresse IP peut facilement être trafiquée.
Le patron de L’Observateur du Maroc est l’un des premiers à avoir été exposé. A partir d’octobre 2014, le compte anonyme a rendu public plusieurs centaines d’emails supposés avoir été reçus ou envoyés entre 2007 et 2012 par Mourad El Ghoul, alors directeur de cabinet du patron de la DGED, Yassine Mansouri. Parmi ces emails, ceux en provenance ou à destination de la boîte de messagerie d’Ahmed Charai sont les plus nombreux.
Si les câbles et notes diplomatiques fuités sont difficiles à authentifier, certains mails en revanche ne laissent pas de place au doute. Comme l’avait dévoilé en décembre 2014 le journaliste français Jean-Marc Manach, certains fichiers originaux (.elm) fuités par « Chris Coleman » ont en effet une signature DKIM valide, ce qui signifie qu’ils n’ont pas pu être modifiés après leur envoi. Cela concerne les mails envoyés à partir des adresses Yahoo de plusieurs personnalités : Ahmed Charai, mais aussi l’analyste politique Said Temsamani ou encore Serge Berdugo, le secrétaire général du conseil des communautés israélites au Maroc et ambassadeur itinérant de Mohammed VI.
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