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Media Fail
10.09.2020 à 02 H 55 • Mis à jour le 10.09.2020 à 02 H 55 • Temps de lecture : 1 minutes
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Les pilotes licenciés «soutenus par des pays hostiles»: une fake news distillée par la RAM

Deux lettres de soutien aux 65 pilotes licenciés par la Royal Air Maroc adressées début septembre au P-DG de la compagnie nationale, l’une émanant du Syndicat des pilotes de ligne algériens, l’autre de l’Association des pilotes de ligne Sud-Africains, ont suscité une vive polémique sur les réseaux sociaux et la presse. La fuite organisée de ces missives a pour seul objectif de discréditer les pilotes licenciés en les accusant de haute trahison. Voici comment
À l'origine
Deux lettres adressées début septembre au P-DG de la Royal Air Maroc (RAM), l’une émanant du syndicat des pilotes de ligne algériens (SPLA), l’autre de l’Association des pilotes de ligne Sud-Africains, ont suscité une vive polémique sur les réseaux sociaux et la presse.

L’instance algérienne appelle la RAM, en sa qualité d’organisations affiliée à l’Union maghrébine des pilotes de ligne (UMPL) et de la Fédération internationale des pilotes de ligne (IFALPA), à « reconsidérer la mesure de licenciement économique prononcée à l’encontre de 65 pilotes ». (Lire à ce propos notre enquête)



Quant à l’association sud-africaine, celle-ci s’insurge en des termes plus durs contre ce qu’elle estime être un « nettoyage ethnique » des pilotes marocains, ce qui, affirme-t-elle, est de nature à impacter la sécurité des vols de la RAM…

Les détails
Les deux missives ont été largement partagées sur les réseaux sociaux provoquant des commentaires divers. « Aucun terme ni adjectif pour qualifier ce qui vient de se passer: les syndicats des pilotes de ligne ALGÉRIENS et SUD-AFRICAINS (quelle coïncidence, que des AMIS du Maroc !!!!) ont adressé une correspondance officielle au PDG de la RAM l’invitant à surseoir au licenciement des pilotes de ligne de la compagnie. Que viennent faire des pilotes et syndicalistes algériens ou sud-africains dans ce dossier ? Pourquoi ont-ils décidé de s’en mêler ? Et surtout qui leur a demandé de le faire ? », peut-on lire dans un message anonyme accompagnant les missives, largement partagé sur WhatsApp…

Certains médias, comme Maghreb Intelligence y ont vu une « inexplicable goujaterie » de l’association marocaine des pilotes de ligne (AMPL) qui « a mis les autorités marocaines dans l’embarras ». « Le recours à des syndicats de pilotes de pays, diplomatiquement hostiles aux intérêts nationaux marocains, n’a pas été au goût des autorités chérifiennes, notamment de la part de salariés d’une compagnie qui fait partie des emblèmes de a souveraineté du pays », le site d’information.

« Deux courriers incriminés, à raison d’ailleurs puisqu’ils ne sont certainement pas dénués d’arrière-pensées et de malice », renchérit de son côté L’Opinion.ma

Le tort des pilotes licenciés de l’AMPL serait donc qu’ils ont reçu le soutien de leurs confrères algériens et sud-africains. « Comme ces deux pays sont les plus grands ennemis de l’intégrité territoriale du Maroc, la trahison a été tout de suite trouvée. Une manière de charger l’opinion publique contre les pilotes », note L’Observateur du Maroc.

 Fait connexe, Karim Seghouane président du syndicat des pilotes d’Air Algérie a remis sa démission le 8 septembre, a rapporté TSA. Conséquence d’une ingérence dans les affaires marocaines qui aurait poussé le pouvoir d’Alger à vite réagir pour désamorcer une crise diplomatique avec Rabat ? Le concerné nie en bloc : « Ma démission n’a absolument rien à voir avec le conflit social au sein de la compagnie Royal Air Maroc qui a licencié de nombreux pilotes dont 26 sont des syndicalistes. Nous avons apporté notre soutien aux pilotes licenciés et demandé à la RAM d’opter pour le dialogue, c’est tout », a-t-il déclaré.

« Le champ d’expression des volontés de changement incluant la pensée et l’action syndicale dont je me prévaux se trouve aujourd’hui contrarié par des comportements qui s’inscrivent en faux par rapport aux référents et aux modèles qui font de notre syndicat une véritable et réelle force de proposition », a poursuivi Seghouane laissant ainsi planer le doute sur les raisons de son retrait…

 

 
Les faits réels
En réalité, les syndicats algérien et sud-africain ne sont pas les seuls à avoir réagi. Les Tunisiens, les Libanais, les Kenyans, les Brésiliens, les Bengalis et d’autres encore à venir ont tout aussi exprimé leur soutien à leurs confrères marocains, comme le montre les lettres envoyées au P-DG de la RAM, mais aussi à d’autres instances gouvernementales.









 

Il faut savoir que ces associations et syndicats nationaux sont affiliés à l’IFALPA, instance supranationale fondée en 1948 représentant près de 140 000 membres dans plus de 100 pays. Celle-ci se doit, selon ses statuts, nous explique un porte-parole de l’AMPL, de relayer les problèmes vécus par les pilotes qui pourraient affecter la sécurité des vols, et de requérir à tous ces membres d’agir en conséquence en leur exprimant un soutien formel.



 

 
Le verdict
À aucun moment, les pilotes licenciés de la Royal Air Maroc n'ont sollicité directement les associations des pilotes algériens et sud-africains pour avoir leur soutien. La mobilisation des pilotes de tout le continent mais aussi d'ailleurs est chose commune, rentrant dans le cadre d'une « assistance mutuelle » entre organisations représentatives des pilotes, assure une source autorisée de l’AMPL contactée par Le Desk.

De ce qui précède, il s’agit de toute évidence, tout comme la vidéo concoctée par la communication de la RAM avec le concours de Chouf TV pour dénigrer les pilotes licenciés, d’une opération d’intox destinée à asseoir l’idée au sein de l’opinion publique que l’AMPL a déporté son action revendicative sur le terrain miné des relations internationales.

Selon nos recherches, et comme pour l’infox de Chouf TV, le choix délibéré de ne fuiter à la presse que deux courriers établis par des associations et syndicats de « pays hostiles aux intérêts du Maroc » (l’Algérie et l’Afrique du Sud en l’occurrence sur la question épineuse du Sahara) ne pouvait émaner que d’une source unique, la direction de la RAM destinataire de ses courriers. Elle vise à dépeindre les pilotes réfractaires en « traitres à la nation ». Ceci renseigne sur le climat délétère qui entoure ce conflit social, alimenté par des fake news vecteurs de messages attentatoires aux personnes visées. Des cas suffisamment graves pour qu’ils soient urgemment pris en compte par les autorités compétentes et les instances de représentation publique.

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