n°192.Comment l’Etat justifie la finalité de son programme de déradicalisation
La grâce royale accordée à 13 détenus condamnés en vertu de la loi anti-terroriste a suscité nombre d’interrogations, d’autant qu’elle est intervenue au lendemain des attentats meurtriers de Barcelone, de Cambrils et de Turku.
L’Etat a dans ce sens livré ce qu’il entend promouvoir à travers un programme ambitieux de déradicalisation et de réconciliation à l’adresse de détenus condamnés pour des faits de terrorisme.
Mohammed VI gracie 415 personnes dont des condamnés pour terrorisme https://t.co/ncb6lBpUf3 via @LeDesk_ma
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Le programme « Mossalaha » destiné aux détenus condamnés dans les affaires liées à l'intégrisme et au terrorisme s’appuie sur trois axes, à savoir « la réconciliation avec soi-même, le texte religieux et la société », a souligné la Délégation générale à l'administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR).
Ces axes ont été élaborés sur la base de la conviction ferme de la DGAPR quant à l’importance d’assurer les conditions de réintégration des personnes condamnées et détenues dans des affaires liées au terrorisme et à la radicalisation, une réintégration qui nécessite une approche scientifique innovante et complémentaire avec les efforts multidimensionnels consentis en matière de lutte contre le terrorisme et l’intégrisme et de protection de la société marocaines contre ces fléaux, à travers une démarche de sécurité préventive, de préservation spirituelle et de lutte contre la précarité, indique la Délégation, jeudi, dans un communiqué.
Le programme « Mossalaha » (Réconciliation) élaboré par la DGAPR, qui en a également défini les modalités de mise en œuvre en s’appuyant sur ses propres ressources et dans le cadre d’une coopération avec la Rabita Mohammadia des Oulémas, le conseil national des droits de l’Homme (CNDH) et des experts, « s'inspire des orientations royales prônant la consolidation des valeurs de citoyenneté, de tolérance et de modération, ainsi que la promotion du sens de responsabilité et de citoyenneté parmi les différentes catégories et les acteurs de la société marocaine », affirme la même source.
Il s’inspire également « de l’intérêt accordé par le Roi Mohammed VI à la nécessité de réformer la justice pénale au Maroc, sur la base de la citoyenneté, de la reddition de comptes, de la responsabilité, de l’égalité en droits et en devoirs et de l’égalité des chances et de veiller à la préservation de la dignité humaine des détenus ».
Pour la DGAPR, ce programme est une initiative qui consacre le principe qui était à la base de l’expérience de l’Instance équité et réconciliation, mais avec une nouvelle formule qui se distingue par le fait que la réconciliation sera entre les détenus concernés et la société, laquelle a subi des dégâts matériels et moraux à cause de leurs idées intégristes et actes terroristes.
« Ce programme, unique en son genre au niveau international, s’inscrit dans la nouvelle stratégie de la DGAPR basée sur l’individualisation de la peine, la mise en œuvre des programmes d’humanisation des conditions de détention et la qualification des détenus pour les préparer à l’intégration », souligne le communiqué, ajoutant que ce projet intervient dans le contexte du plan de la Délégation, annoncé en mars de l’année dernière, concernant la promotion de la culture de tolérance et de lutte contre l’intégrisme violent à l’intérieur des prisons.
La même source a fait savoir que la DGAPR a chargé une commission scientifique nationale de haut niveau de mettre en place une méthodologie pour la mise en œuvre du programme, conformément à un référentiel scientifique complet et global, le distinguant des programmes de dialogue adoptés, auparavant, aux niveaux national et régional.
Dans ce sens, le communiqué explique que l’objectif central du programme « Mossalaha » est l’encadrement global et la qualification psychologique et intellectuelle, ainsi que dans le comportement des détenus « afin qu’ils agissent d’une manière saine envers le système social et les acteurs institutionnels et humains, ce qui leur permettra une intégration complète et efficace ».
Dans ce cadre, la même source a souligné « le parachèvement avec succès du programme, dans sa première version, durant la période allant du 29 mai au 25 juillet de l’année en cours, et ce dans la prison de Aarjat 1 ».
Elle a également précisé que ce programme a profité aux détenus condamnés dans des affaires liées au terrorisme et à la radicalisation et qui représentent des échantillons de différentes tendances jihadistes et ayant affiché leur volonté de participer à ce programme.
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Ce programme a été mis en œuvre dans ces trois axes, « sur la base de plusieurs dimensions relatives à la qualification religieuse et à tout ce qui a trait à la perception correcte du texte religieux et consacrant les valeurs de tolérance et de modération ». Il concerne aussi la dimension juridique et des droits humains portant sur la qualification des détenus au niveau de perception et d’acceptation du cadre juridique et la dimension relative à la qualification et la réconciliation psychologique, outre l’aspect lié à la qualification socio-économique.
Des séances ont été consacrées, au cours de cette étape, à la présentation d’enregistrements audio-visuels de témoignages de familles des victimes du terrorisme, l’objectif étant de sensibiliser les détenus, condamnés dans le cadre de terrorisme et d’intégrisme, à l’ampleur des effets des préjudices provoqués par l’extrémisme violent et leur effet sur la stabilité et la sécurité de la société, ainsi que les dégâts directs qu’ont subis les victimes.
L’accent a été également mis sur l’accompagnement psychologique « pour éviter d’aggraver le sentiment de remords susceptible de porter atteinte à l’opération de convalescence et de réhabilitation de conduite, ajoute le communiqué relevant que le programme a été sanctionné par la tenue d’une conférence sous forme d’un exercice expérimental jaugeant la capacité des détenus à acquérir les techniques en mesure de contrer le discours intégriste ».
La commission scientifique s’est assurée, à travers une évaluation faite sur la base d’indices scientifiques précis, de l’interaction positive des détenus bénéficiaires et d’un développement remarqué concernant l’interprétation du texte religieux et l’approche des valeurs justes de la société.
« L’administration pénitentiaire et ses partenaires ont mis l’accent sur l’importance et la particularité de cette initiative, en ce sens qu’elle se démarque de toutes influences conjoncturelles, affichant leur détermination à assurer sa pérennisation, tout en restant ouverts sur d’autres partenaires intéressés, en vue de lancer une deuxième version de cette initiative au profit de nouveaux candidats parmi les détenus qui ont exprimé leur volonté d’adhérer à ce programme de qualification religieuse », conclut la même source.
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