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26.09.2019 à 13 H 18 • Mis à jour le 26.09.2019 à 13 H 18 • Temps de lecture : 30 minutes
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Jacques Chirac, ou l’obsession du pouvoir

PORTRAIT Jacques Chirac est décédé jeudi 26 septembre, à l’âge de 86 ans. Il laisse derrière lui quarante années de combats politiques. Mais l’héritage est bien maigre tant cette carrière s’est construite sur la seule ambition de gagner le pouvoir, puis de le conserver. Au prix de guerres de tranchées incessantes, d’alliances et de contre-alliances, de trahisons et de scandales, de tout et son contraire. Récit des douze métamorphoses de Chirac

C’est une vie entière de féroces batailles pour le pouvoir. Pour, finalement, n’en rien faire ou si peu. Jacques Chirac, qui vient de mourir, ce jeudi 26 septembre, douze ans après avoir quitté l’Élysée, laisse derrière lui quarante années de vie publique. L’héritage est bien maigre, sauf à considérer que ce qu’il a si longtemps incarné comme manière de faire de la politique mérite d’être transmis.


« En fait, je suis le dernier des grands présidents », aimait à dire François Mitterrand (lire ici). Il n’est pas sûr qu’il se trompait. Comme lui, Jacques Chirac a certes emporté deux mandats présidentiels. Mais le premier s’est brisé sur un premier ministre « droit dans ses bottes », sourd aux appels de la société : Alain Juppé  puis sur une cohabitation avec le gouvernement Jospin, qui allait en faire un roi nu. Quant à son second mandat, gagné à la suite du retentissant court-circuit électoral de 2002, il fut celui d’un « roi fainéant », comme l’expliqua gentiment Nicolas Sarkozy, mandat inutile et temps perdu symbolisés par un premier ministre transparent : Jean-Pierre Raffarin.


De son premier mandat de député, en 1967, à sa sortie de l’Élysée, en 2007, Jacques Chirac a traversé la Ve République. Ce parcours n’est qu’une longue suite de combats incessants au sein du vieil appareil gaulliste de l’UDR, puis du RPR, fondés sur un principe simple : gagner, c’est d’abord éliminer les autres. À tout prix et par tous les moyens. Chaban-Delmas, Giscard d’Estaing, Édouard Balladur (mais aussi Michel Debré, Charles Pasqua, Philippe Séguin et tant d’autres) sont les victimes les plus célèbres de cet art politique si longtemps glorifié qui consiste à ériger l’ambition pure en projet politique.


En ce sens, Jacques Chirac est un produit sophistiqué de la fusion du monarchisme institutionnel de la Ve République et de l’ambition sans limites où l’impunité érigée en système autorise tout : alliances et contre-alliances, affaires et scandales, volte-face et opportunisme. Cela construit d’interminables carrières politiques (une spécificité bien française)  cela ne cesse d’abîmer le lien des citoyens à la chose publique et de dévitaliser une démocratie malade de ces pratiques.


Au moment où la République, par ses représentants – et Emmanuel Macron ne manquera pas d’être au premier rang –, s’apprête à rendre un hommage grandiloquent à l’ancien chef d’État, il faut donc regarder au-delà de la Chirac-nostalgie qui ne va pas manquer d’envahir les médias : est-on vraiment certain d’apprécier ces “grands fauves”, dont certains nous accompagnent depuis le berceau et sont les responsables directs de l’affaissement démocratique et de la crise de représentation politique sans précédent que nous connaissons ?


À ce bilan en forme de trou noir d’un demi-siècle de chiraquisme, il faut pourtant faire trois exceptions. Et retenir trois actes politiques forts, qui ont rehaussé ce pays et laissé entrevoir la grandeur de la politique.


Le premier est le discours du Vél’ d’Hiv’. À peine élu, le 16 juillet 1995, Jacques Chirac reconnaît enfin, et dans un magnifique discours, la responsabilité de la France dans la déportation des juifs durant l’Occupation. « La France, patrie des Lumières et des Droits de l'homme, terre d'accueil et d'asile, la France, ce jour-là, accomplissait l'irréparable. »C’est un discours fondateur, après les années de refus obstiné de François Mitterrand, un discours libérateur aussi, tant il rassemble la nation autour d’un examen lucide de son passé et de sa mémoire.

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