Législatives 2016 : Pourquoi tout est déjà joué d’avance

A six semaines des secondes législatives après la Constitution de 2011, aucun des partis politiques les plus en vus pour mener la bataille électorale n’a encore dévoilé son programme.
Dans cette perspective qui se fait attendre, Le Desk propose une série d’articles de fond faisant le point sur ce qui est nécessaire à savoir et à comprendre avant cette importante échéance politique.
Premier rappel tout d’abord sur les promesses électorales faites en 2011 par le parti d’Abdelilah Benkirane, qui vient de passer cinq ans à la Primature. Une synthèse en 13 vignettes infographiques qui permet d’évaluer la crédibilité des promesses affichées à l’époque.
La situation actuelle en terme de croissance, de revenus, de taux de chômage, de place du Maroc dans différents classements internationaux, d’indicateurs de santé et d’alphabétisation, sont globalement très en deçà des objectifs annoncés.
Certes, Le PJD ne gouverne pas seul. Le système électoral en vigueur empêche la formation de toute majorité au Parlement. Résultat, quel que soit le programme qui sera présenté par chacune des écuries, le nécessaire jeu d’alliances pour former un gouvernement solidaire conduira immanquablement à des concessions qui réduiront la marge de manœuvre du vainqueur dans l’exercice du pouvoir.
L’abaissement du seuil électoral à 3 % décidé par l’Intérieur favorise d’ailleurs cette configuration où le PJD occupe de facto une position dominante dans l’échiquier politique, avec le PAM comme principal parti d’opposition, tout en fragmentant un peu plus la prochaine coalition gouvernementale.
Partant de ce constat, quels sont alors les véritables enjeux de ce scrutin ?
Sur le plan de la représentation démocratique, il est significatif de constater que le taux de participation de la population en âge de voter n’atteindra pas les niveaux historiques de la période 2002-2007.
Il est aussi admis que la compétition se fera d’abord entre le PJD, - dont la popularité de son leader, Abdelilah Benkirane, a été sans conteste affermie grâce à l’épaisseur politique qu’il a acquise durant son mandat de chef du gouvernement - , et son challenger tout désigné, le PAM, avec Ilyas El Omari qui ronge son frein pour en découdre avec son adversaire.
Enfin, et c’est la donne la plus saillante et pourtant la plus méconnue, concerne les engagements pris par l’Etat envers le FMI en contrepartie d’une nouvelle ligne de liquidité et de précaution.
Ce pacte a gravé dans le marbre des objectifs budgétaires plus contraignants : le déficit budgétaire devra désormais être ramené à 2 % du PIB. Objectif que les autorités marocaines se sont engagées à atteindre d’ici 2021.
Trois contraintes s’imposent donc aux partis politiques et à leurs programmes économiques pour les cinq ans à venir : une cible de déficit de 2 % du PIB, une croissance de celui-ci à 4.9 % et un objectif de dette publique à 60 % du PIB. Toute promesse électorale qui dérogerait à ce cadre ne serait donc pas crédible.
En conclusion, la grand-messe démocratique promise pour octobre est déjà scénarisée. Le PJD qui dirige la coalition actuelle ne sera pas pénalisé pour avoir promis la lune. S’il arrive en tête, éventualité déjà pronostiquée par les projections déduites des régionales de septembre dernier, celui-ci devra faire face à un PAM renforcé dans son statut de principale force d’opposition. Mais sa victoire ne fera de Benkirane, affaibli par des alliés disparates, que le simple ordonnateur d’une politique décidée par l’institution monarchique à travers la technostructure de l’Etat, sous l’œil scrutateur du FMI.
Moralité, quelles que soient les tensions observées depuis quelques semaines entre le PJD et l’Etat, Abdelilah Benkirane demeure l’allié objectif du Makhzen dans la conduite des affaires du pays. La seule obsession de ses détracteurs est de le maintenir pied et poings liés pour les cinq ans à venir. Il faut croire que cette condition est déjà acquise.