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12.10.2021 à 18 H 16 • Mis à jour le 12.10.2021 à 18 H 21 • Temps de lecture : 4 minutes
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n°715.Après le naufrage du PJD, le MUR tente la stratégie du repli

Face à un discours mesuré du Parti de la justice et du développement (PJD), sa matrice idéologique, le Mouvement unicité et réforme (MUR), hausse de plus en plus le ton pour s’en démarquer. Que cache cette stratégie ? Éclairage

Pendant que le Parti de la justice et du développement (PJD) tente de panser ses plaies après avoir mordu la poussière aux élections du 8 septembre, son aile de prédication se met sur le devant de la scène. Prenant prétexte de la rentrée scolaire, le Mouvement unicité et réforme (MUR) s’est fendu le 11 octobre d’un communiqué au vitriol pour mettre en garde contre « les tentatives d'exploitation de la diversité culturelle et civilisationnelle du pays pour permettre au sionisme de s’introduire dans l’école marocaine. »


Dans le même communiqué, la matrice idéologique du parti islamiste exprime son refus de « l’exploitation d’une interprétation de certains articles de la loi-cadre (relative à la réforme du système éducatif, ndlr) afin de franciser l'enseignement et imposer la langue française dans l'enseignement des matières scientifiques dans toutes les sections, y compris la section primaire. »


Le même jour, l’Organisation du renouveau estudiantin au Maroc (Orema), association réputée proche du MUR, est montée elle aussi au créneau contre la normalisation des relations avec Israël, appelant, dans un communiqué, « l'État à revoir tous les accords avec l'ennemi sioniste et à le considérer comme une entité criminelle et raciste », « couper les relations avec lui et l’exposer au lieu de blanchir ses crimes en Palestine occupée et à l'étranger par la voie de la normalisation. »


Face donc à un discours mesuré du PJD, l’aile de prédication adopte un ton virulent comme pour se démarquer du parti sur la question de l’identité marocaine et la question palestinienne. Un ancien membre du MUR y voit « une stratégie qui consiste à prendre ses distances avec le parti pour fidéliser ses membres et ses sympathisants. »

 

La « trahison » des frères, un prélude

Dès le lendemain des élections, plusieurs voix au sein du PJD ont dénoncé mezza voce la « trahison » du mouvement de prédication, qui n’a pas appelé cette fois ses fidèles à voter pour le parti de la lampe. « Il n’y a pas eu de mobilisation de la part du MUR », nous confirmait récemment l’ancien éditorialiste d’Attajdid, Bilal Talidi. « Quand ils sont enthousiastes, les membres peuvent suivre la campagne, S’ils ne sont pas enthousiastes, c’est leur liberté », répondait au Desk une source autorisée au sein du MUR.


Pour marquer sa distance avec le gouvernement El Otmani, le patron du mouvement Abderrahim Chikhi avait également intimé l’ordre aux responsables des instances dirigeantes du MUR de ne pas se présenter sous les couleurs du PJD. Et, contrairement à Abdelilah Benkirane, qui avait volé au secours de son adversaire après la signature de l’accord tripartite, Abderrahim Chikhi, n’avait pas hésité, en décembre 2020, à se désolidariser de Saâdeddine El Otmani, en exprimant, dans un communiqué du mouvement, son refus de « toutes les tentatives de normalisation et d'infiltration sioniste considérant que « les mesures prises par le Maroc, qui préside le comité Al Qods, constituent une évolution regrettable et une mesure inacceptable qui va à l'encontre de l'appui ferme et honorable du Maroc à la cause palestinienne. »

 

« Une machine de guerre de la mobilisation »

« Comme le PJD s’effondre, le mouvement veut constituer une base de repli pour les militants déçus du parti à cause de certaines décisions comme la normalisation avec Israël », nous explique une source proche du MUR.


Né en 1996 d’un mariage entre Al Islah Wa Attajdid (Réforme et renouveau), qui comptait parmi ses principales figures Saâdeddine El Otmani, Abdelilah Benkirane et Mohamed Yatim, et Rabitat Al Moustakbal Al Islami (Alliance pour le futur islamique), dont Ahmed Raissouni, Lahcen Daoudi et Mostafa Ramid étaient les figures de proue, le MUR s’est frayé un chemin vers la politique à travers le Mouvement populaire démocratique et constitutionnel (MPDC) du Dr. Abdelkrim Khatib, sans jamais renoncer à la prédication.

 

« Le mouvement a toujours tenté de garder une certaine autonomie. Ce n’est pas comme en Tunisie où Ennahda s’est transformé complètement en parti politique. Malgré les pressions et les incitations, le MUR a toujours refusé de se fondre dans parti. D’ailleurs, lors de la création du PJD, seul un tiers du mouvement avait rejoint du PJD », analysait récemment pour Le Desk le spécialiste du mouvement islamiste Abderrahim El Allam, professeur de sciences politiques à l’Université Cadi Ayyad de Marrakech.


Comptant quelque 20 000 membres, l’association estudiantine Orema, un syndicat (l'Union nationale du travail au maroc - UNTM), une imprimerie (Top Press), des associations dans les quatre coins du royaume, des écoles, comme celle de Salé ou l’école coranique de Lamine Boukhobza à Tétouan, ce puissant mouvement est une véritable base de repli pour les islamistes. Si bien que, durant le blocage gouvernemental qui a suivi les élections législatives de 2016, Abdelilah Benkirane disaient à ses hôtes qu’ils n’excluaient pas de « rendre les clés » pour revenir à la prédication.


C’est aussi une puissante « machine de guerre de la mobilisation ». Le 1er mai 2011, les vents du Printemps arabe étant alors favorables aux islamistes, le MUR n’avait trouvé aucune difficulté à mobiliser, à travers notamment le syndicat UNTM, pas moins 100 000 manifestants pour chanter le slogan de la « réforme dans la stabilité » et contre ceux du 20-Février.

 

« C’est cette force de frappe que ne veut pas perdre le MUR », commente cet ancien membre du mouvement. Selon Abderrahim El Allam, le mouvement islamiste craint aussi que certains militants déçus du PJD se radicalisent en se jetant dans les bras d’Al Adl Wal Ihssane, le mouvement islamiste dont les positions identitaires sont de nature à les séduire.

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