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11.04.2017 à 16 H 35 • Mis à jour le 11.04.2017 à 16 H 38 • Temps de lecture : 8 minutes
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n°123.Sahara : les points-clés du rapport Guterres sur le Sahara Occidental

Le rapport du secrétaire général de l’ONU sur la situation au Sahara occidental dont l’avant-texte a été rendu public lundi 10 avril dénote de la volonté d’Antonio Guterres de « dynamiser » des négociations directes aujourd’hui dans l’impasse. Sur de nombreux points, il est à l’avantage du Maroc s'attachant à la recherche d’un compromis politique. Il enjoint l’Algérie à s’impliquer dans la résolution du conflit

Sans grande surprise le rapport annuel du secrétaire général des Nations Unies sur le Sahara Occidental a privilégié la voie du compromis et exposé sa ferme volonté à dynamiser des négociations directes qui sont pour le moment suspendues. Antonio Guterres a invité le Conseil de sécurité à prolonger, pour une année supplémentaire, le mandat de la Minurso et apporte quelques appréciations novatrices sur les voies à emprunter pour tendre vers une solution définitive au conflit et mutuellement acceptable par les parties. Fait à souligner, le rapport exhorte toutes les parties à s'engager dans ce sens, y compris l'Algérie.


- Sur les tensions observées sur le terrain

Comme à l’accoutumée, le rapport du secrétaire général des Nations Unies revient sur les événements qui ont concerné le territoire depuis un an rappelant notamment l’escalade qu’a connue la région de Guerguerat aux confins de la frontière sud avec la Mauritanie.


Le retrait unilatéral du Maroc a eu à l’évidence son effet, puisqu’Antonio Guterres y fait référence en exprimant sa satisfaction envers Rabat, d’autant que Rabat avait selon les termes du rapport « initialement conditionné ce retrait à celui du Polisario » et requis un engagement onusien pour que les travaux de goudronnage de la route aujourd’hui à l’arrêt soient parachevés. En revanche le secrétaire général de l’ONU a fait part de sa « profonde préoccupation » quant au refus du Polisario à obtempérer à son appel faisant le point détaillé sur les actions menées par les éléments du Polisario à l’encontre des véhicules marocains qui empruntent le corridor menant vers la Mauritanie. Il a souligné avec regret que ces actes d’obstruction se poursuivaient encore malgré les requêtes et protestations du Maroc qui a dans ce sens requis l’intervention de la Minurso. Guterres a donc logiquement demandé au Conseil de sécurité d’exhorter le Polisario à se retirer de la zone « de manière inconditionnelle ».

 

Sur le plan de la sécurité, la poussée de fièvre autour de Guerguerat a fait l’objet d’un long développement dans le rapport. Antonio Guterres fait ainsi référence à l’appel de Ban Ki-moon du 28 août 2016 adressé au Maroc et au Polisario « à suspendre toute action qui modifie le statu quo et à retirer tous les éléments armés afin d'empêcher toute nouvelle escalade et permettre à la Mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (Minurso) de tenir des discussions avec les deux parties sur la situation ».

 

Le rapport insiste pour « permettre à la région de faire face aux menaces sécuritaires, aux défis économiques et aux souffrances humaines de manière coordonnée ». La persistance des tensions à Guerguerat et le chassé-croisé entre le Maroc sur la définition des forces en présence ont poussé, fait tout à fait novateur, le secrétaire général à ouvrir la réflexion sur la révision éventuelle des contours techniques de l’Accord militaire n°1 de 1991 qui définit les clauses du cessez-le-feu. « Des questions se posent quant à l’accord de cessez-le-feu et à l’accord militaire numéro 1, qui ne concerne que les forces militaires des deux parties, et ne contient aucune provision aux activités civiles », a –t-il noté soulignant que l’habillage de forces militaires en forces de police ou de gendarmerie étaient de nature à contredire « l’esprit du cessez-le-feu de 1991 ».

 

Selon une source proche du dossier consultée par Le Desk, cette position nouvelle de la part du secrétaire général « est de nature à encourager le Conseil de sécurité à proposer en amont de la reprise d’éventuelles négociations que les parties s’accordent à nouveau sous l’égide de l’ONU sur une définition plus claire de leur engagement de leurs forces sur le terrain afin d’éviter toute nouvelle escalade, mais surtout d’inscrire dans le dur une obligation contraignante au retrait du Polisario de la zone tampon ».


Autre point nodal qui fait la différence avec le rapport précédent établi il y a un par Ban Ki-moon, aucune mention sur la question de « l’exploitation des ressources naturelles », n’est à relever. Ce que ne manque pas de souligner la diplomatie marocaine qui interprète cette absence par « le distinguo désormais établi avec clarté » entre les rapports entretenus entre le royaume et l’Union européenne et la gestion politique du dossier qui demeure « exclusive à l’ONU ». En clair, la tentative d’inclure le débat juridique qui découle de la décision de la Cour de Justice européenne (CJUE) par le Polisario a été vaine.


- Sur le monitoring des droits de l’Homme

Le Maroc a obtenu gain de cause sur cette question. Le secrétaire général de l’ONU n’a pas requis que le mandat de la Minurso soit étendu aux droits de l’Homme. Ceci-dit, Guterres a souligné la nécessité d’un « monitoring indépendant, impartial et exhaustif » que ce soit sur le territoire contesté ou dans les camps de Tindouf en territoire algérien. Une formulation qui maintient la question sur la table puisque ce monitoring est « requis », mais il ne prévoit pas cependant de mécanisme contraignant pour les belligérants. Cela offre au Maroc, mais aussi au Polisario de recevoir « des appréciations externes sans que la question de la territorialité ou du mandat spécifique de la mission de maintien de la paix constituent une condition préalable », explique une source diplomatique.


- Sur l’implication des parties dans la reprise des négociations

Là encore, le rapport d’Antonio Guterres n’adopte pas de position contraignante. Il se limite à réitérer comme l’a fait son prédécesseur à « une posture d’encouragement des parties », analyse un diplomate. Le secrétaire général exhorte ainsi les belligérants en exprimant sa volonté « de relancer le processus de négociation avec une nouvelle dynamique ».

 

Mais dès le second point de ses observations et recommandations (paragraphe 81), Guterres place le curseur de ces négociations aujourd’hui au point mort, à la « série de résolutions prises dès 2007 par le Conseil de sécurité (…) dans l’objectif d’atteindre une solution politique mutuellement acceptable offrant l’autodétermination pour le peuple du Sahara occidental ».


Sur cet aspect, le rapport insiste sur « les efforts consentis dès 2006 et ses développements consécutifs (…) avec réalisme et dans un esprit de compromis ». Un momentum qui a tout son intérêt aux yeux du Maroc puisqu’il se place définitivement « au-delà du plan tracé par James Baker et son cadre figé qui menait irrémédiablement après une période d’autonomie de cinq ans à un référendum d’autodétermination », explique une source diplomatique consultée par Le Desk, qui ajoute que « la notion de réalisme est justement celle introduite en 2008 par l’Envoyé spécial Peter Van Walsum devant le Conseil de sécurité ». Le diplomate néerlandais avait en effet, à cette occasion, souligné que l’indépendance du Sahara occidental n’était pas une option réaliste au vu de la réalité de la situation sur le terrain. Dans ce sens, Guterres exprime son intention de relancer la dynamique des négociations dans cet esprit de conciliation dans l’objectif d’atteindre la résolution du statut du Sahara occidental « incluant un accord sur la nature et la forme de l’exercice d’auto-détermination ». Autrement dit, le corset jusqu’ici redouté par la diplomatie marocaine que revêtaient les termes « référendum » ou « territoire non autonome », ne sont plus spécifiquement évoqués, laissant la place à plus d’imagination pour le prochain Envoyé spécial dans sa recherche d’un chemin de traverse pour relancer les parties à la discussion.


Autre point est non des moindres à l’avantage du Maroc : si le secrétaire général indique que pour qu’un progrès soit effectif, « les négociations devraient être ouvertes aux propositions des deux parties », l’Algérie et la Mauritanie « peuvent et doivent apporter leurs contributions au processus ». Une affirmation qui contente la diplomatie marocaine qui a toujours insisté pour qu’Alger soit considéré comme partie prenante de la solution globale.

 

- Sur le retour effectif du contingent de la Minurso

Le rapport d'Antonio Guterres confirme que la Minurso a retrouvé ses pleines capacités suites à des discussions ultimes engagées avec le Maroc ses dernières semaines. Le secrétaire général confirme aussi l’information précédemment obtenue par Le Desk sur la conclusion en juin 2016 d’un gentlemen’s agreement avec le secrétariat général par lequel le Maroc s’engageait au retour – sans exigences supplémentaires – de la composante civile de la Minurso, soit 42 casques bleus (50 % du contingent d’origine). « Rabat entendait vouloir gérer la pleine fonctionnalité de la mission en imposant un timing qui était en fait conditionné par plusieurs facteurs. Le premier était de ne pas y concéder alors que le mandat de Ban Ki-moon touchait à sa fin, cela aurait été tout simplement improductif », expliquait au Desk le 8 avril une source diplomatique de haut niveau en charge du dossier.


- Sur le statut ambivalent de Christopher Ross

La démission de Christopher Ross, envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara est tout aussi confirmée par le rapport alors qu’elle n’avait pas donné lieu jusqu’ici à une communication officielle. « L’Envoyé personnel m’a transmis une lettre datée du 23 janvier dans laquelle il remet sa démission effective à la date de mon choix », explique Guterres, qui précise donc ainsi qu’elle n’était pas effective au moment où le chef du Polisario s’était déplacé à New York pour le rencontrer, réunion à laquelle Ross avait assisté et dont la teneur est demeurée confidentielle.


Le statut de Ross demeure donc ambivalent jusqu’à la prise de fonction de l’allemand Horst Köhler à son poste, d’autant que le rapport révèle que le Maroc avait indiqué lors d’une audience - restée secrète - accordée à un de ses émissaires qu’il « ne recevrait plus l’envoyé personnel », tout en assurant que le roi Mohammed VI était pleinement disposé à collaborer avec le secrétaire général dans le but de trouver « une solution au différend du Sahara ».

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