Horizon Press: Belkhayat accuse une «5ème colonne» et réfute toute divergence avec MHE
La situation au sein du groupe Horizon Press continue d’agiter le landernau médiatique. Dernière sortie en date, les critiques sévères de Salahdeddine Lemaïzi, ancien journaliste des Inspirations Eco exprimées par une série de tweets.
Hello Twitter, quelques mots au sujet de la situation à #LesEco, les agissements de @MoncefBelkhayat et @MyHafidElalamy, la presse d’oligarques et le combat digne et rare d’une rédaction marocaine. #JournalistesDignité ?
— Salaheddine Lemaizi (@LemaizO) April 17, 2020
Dirigé par l’homme d’affaires Moncef Belkhayat, actionnaire à 51 %, aux côtés de Moulay Hafid Elalamy (MHE) (34 %), Samir Chaouki (10 %) et Said Alj (5 %), le groupe traverse une forte crise en raison des effets du Covid-19 sur un secteur particulièrement touché.
De nouvelles mesures d’austérité décidées au sein d’Horizon Press, après celle de la coupe des salaires a provoqué une vive réaction du bureau syndical de l’entreprise, affilié au Syndicat national de la presse (SNPM).
La direction d’Horizon Press a ainsi procédé à une réduction du temps de travail, qui passe désormais à 4h par jour, à compter du 25 avril. Ce qui induit une nouvelle baisse mécanique des salaires, déjà consentie par une écrasante majorité du personnel.
Face au SNPM, Belkhayat a réagi avec véhémence dans une déclaration à Yabiladi : « Je leur dis : Vous n’êtes pas en chômage technique. Que le bras de fer continue et s’il faut tuer ce journal, je le tuerai. Je vais aller avec leur bras de fer jusqu’à la nuit des temps et nous verrons jusqu’où cette histoire va nous mener, quitte à tuer le journal ».
Des déclarations qui ont enflammé le débat sur les réseaux sociaux et au sein de la profession sur le rôle des riches actionnaires de médias, d’autant que dans le cas d’Horizon Press, déjà subventionné par l’Etat à l’instar d’autres médias et qui bénéficie du report de cotisations sociales autorisé en cette période de crise, a déposé le 15 avril une demande de crédit de 5,4 MDH avec la garantie de l'Etat dans le cadre du dispositif « Damane Oxygène » de la Caisse centrale de garantie (CCG), a révélé Yabiladi.
Une demande de financement justifiée par une baisse de revenus de 80 % sur un an glissant, et d’une prévision de chiffre d'affaires en chute de 65 % sur l'année 2020 (CA de 25 MDH en 2019), précise le site d’information. Or, cette requête se fonde notamment sur une masse salariale antérieure (donc avant sa réduction) pourtant déclarée pour les trois mois justifiant le montant du crédit.
Dès lors, c’est le manque d’implication directe des actionnaires dans le sauvetage de l’entreprise qui est fortement questionné.
De sources proches de Saham Media Fund (Elalamy), l’actionnaire de référence du média avant sa fusion avec Cross Word (Belkhayat), préparait depuis novembre 2018 une transition managériale de l’entreprise après que Samir Chaouki, son fondateur ait exprimé le souhait de se retirer. Un accord avait été trouvé pour que ce départ négocié se fasse au bout d’un an. Dans l’intervalle, les modalités de transfert à Moncef Belkhayat avaient été engagées.
Jusque-là, Saham Media Fund avait investi pas moins de 35 millions de dirhams de 2009 à 2019 sans aucune distribution de dividendes alors que les quatre derniers exercices étaient au vert.
Depuis sa prise de contrôle d’Horizon Press, Moncef Belkhayat en assure pleinement la gestion opérationnelle. Face à la crise, Saham Media Fund et Sanam (Said Alj) auraient, selon ces mêmes sources, proposé à la direction actuelle, des solutions alternatives sans ponction sur les salaires, mais celle-ci aurait assuré maitriser la situation…
Samir Chaouki qui après son départ a gardé 10 % du capital a d’ailleurs exprimé implicitement par un tweet son désaccord avec la ligne adoptée par Belkhayat.
En ces temps de confinement, une pensée aux difficultés vécues par des milliers d'entreprises ... Merci à l'État pour son soutien indéffectible. Mais il n'est pas question de toucher à la poche des salariés.
— Samir Chaouki (@SamirChaouki6) April 17, 2020
Contacté par Le Desk, Moncef Belkhayat a réitéré ce qu’il avait exprimé auparavant, à savoir que le schéma de sauvegarde de l’entreprise a été formalisé de « manière consensuelle », que des correspondances par mail ont été faites, reconnaissant que chacun des salariés a été contacté de manière individuelle, et que des avenants aux contrats de travail ont été établis.
Il réfute cependant qu’il existerait une quelconque divergence avec son principal associé, à savoir Moulay Hafid Elalamy. Pour lui, « il y a zéro sujet avec les actionnaires ». « Le management a vu la crise arriver et n’a pas compris la mesure de suspension des éditions papier et l’absence de réaction de la fédération (FMEJ), alors que des pays comme la France, l’Espagne, la Grande-Bretagne, ou encore la Grèce ont maintenu la vente des journaux en kiosque. Dès lors, il a anticipé sur la trésorerie, accepté le paiement de factures avec décote de la part des agences, engagé le processus de crédit Oxygène avec les banques et mis en place le dispositif avec le personnel », explique-t-il, pour « permettre au journal et à la société de survivre ».
Ainsi pour Belkhayat, « sur les 3 à 4 mois à venir, il n’y a pas de débat à avoir avec les actionnaires, aujourd’hui, il est trop tôt pour discuter de leur éventuelle implication future ».
A partir de là, le P-DG d’Horizon Press s’interroge sur ce qu’il n’hésite pas à qualifier de « 5ème colonne » qui « personnalise le débat autour de Moncef Belkhayat ». Il cite ainsi pour s’en convaincre « des situations similaires chez Le Matin, Al Massae, Al Bayane, Al Ayam et Economie&Entreprises, dont personne ne parle ! ».
« Pour quelle raison, martèle-t-il, le président du SNPM, Abdallah Bakkali, n’a parlé lors de l’émission consacrée hier à la situation de la presse sur Medi1TV que d’un homme d’affaires et son groupe de presse et occulté tous ces cas, dont principalement Le Matin ? »…