L’Espagne veut criminaliser l’action d’une activiste au Maroc
La cour d'appel de Tanger a ouvert une enquête criminelle sur la journaliste Helena Maleno, activiste connue des droits des migrants depuis une quinzaine d’années, « dans le but de l'interroger sur les faits incriminés » et « prendre les mesures juridiques appropriée », selon une décision judiciaire, à laquelle El Diario a eu accès.
Le dosssier judiciaire qui la vise, transmis aux autorités marocaines par la police espagnole, la lie aux réseaux de trafic de personnes pour les appels lancés par « Salvamento Maritimo » destinés à informer l’opinion publique des migrants en détresse lors de leur traversée du Détroit de Gibraltar. Grâce à ce système d'alerte, son ONG, Caminando Fronteras, a permis le sauvetage de centaines de personnes qui tentaient d'atteindre la côte espagnole en embarquant sur des pateras depuis les rives marocaines. Pour son engagement, Maleno a reçu en 2015 le Prix des droits de l'homme Nacho de la Mata du Conseil général des avocats espagnols.
Soy Helena Maleno, defensora de Derechos Humanos, y mañana pretenden juzgarme por mi labor por y para las personas migrantes. Defender sus derechos no es un delito. #DefendiendoAMaleno pic.twitter.com/5Awq3w77JY
&mdash Helena Maleno Garzón (@HelenaMaleno) December 4, 2017
Les rapports d’enquête de la DGSN marocaine transmis à la Cour d'Appel de Tanger, se réfèrent aux appels faits par Maleno à partir du Maroc en aide aux candidats « notamment subsahariens » à la traversée « par des moyens illégaux ».
Sur la base de l'un des documents, la police marocaine avait demandé en 2015 aux autorités espagnoles de poursuivre leurs investigations sur le rôle de l’activiste qui n’a pas été formellement déterminé. La DGSN a ainsi requis de ses homologues ibères d’apporter des preuves tangibles sur la base d’enregistrements téléphoniques sur le bien-fondé de l’accusation faisant état de sa supposée appartenance à une « mafia criminelle de trafic d'êtres humains ».
La défense de Maleno assure que la militante « vient d'être informée de l'enquête ouverte à son encontre et a peu d'informations à son sujet », puisqu'elle n'a pas encore pu obtenir une copie complète du dossier pour connaître en détail les accusations portées contre elle.
Depuis son audition à Tanger le 29 novembre, Helena Maleno a continué à répondre aux appels désespérés des migrants en détresse en mer et à transférer les informations reçues à son ONG. L'activiste devrait comparaitre le 27 décembre devant le Tribunal de Tanger alors qu'elle a obtenu nombre de soutiens. Son cas a reçu un large écho par la presse espagnole, dont La Vanguardia, mais aussi au Maroc, notamment par Yabiladi.
El juez aplaza mi declaración al 27 de diciembre. Tiempo para preparar la defensa de las acusaciones e interiorizar la inmensa ola de solidaridad que me llega de todas vosotras. #Seguimos pic.twitter.com/vNwbXZo7wL
&mdash Helena Maleno Garzón (@HelenaMaleno) December 5, 2017
Plusieurs ONG telles que Women's Link, font état de leur préoccupation sur cette volonté de l’Espagne « de criminaliser le travail d'un défenseur des droits de l'homme, alors que Maleno a passé des années à faire un travail crucial en faveur des migrants en danger ». Cette organisation et Caminando Fronteras ont envoyé une communication écrite au rapporteur des Nations Unies pour les défenseurs des droits de l'homme afin d'avertir de l'assignation judiciaire reçue par Helena Maleno, dans un contexte où l'activiste, selon eux, a reçu plusieurs menaces et intimidations dans le passé pour son travail de dénonciation sociale.
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